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ATTAQUE DE LA PRISON DE MAKALA, quand l' histoire bégaye: 17/05/2017 - 02/09/2024

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ATTAQUE DE LA PRISON DE MAKALA, quand l' histoire bégaye: 17/05/2017 - 02/09/2024 Empty ATTAQUE DE LA PRISON DE MAKALA, quand l' histoire bégaye: 17/05/2017 - 02/09/2024

Message  KOTA 5/9/2024, 5:14 pm

ATTAQUE DE LA PRISON DE MAKALA, quand l' histoire bégaye: 17/05/2017 - 02/09/2024 GWdm3IdXMAA_rUU?format=jpg&name=900x900

EXTRAIT DU LIVRE "PRISONNIER POLITIQUE EN RDC" - Editions universitaires Européennes -

CHAPITRE II MAKALA: PLUS QU’UN CENTRE DE REEDUCATION, UN ENFER SUR TERRE Les prisons congolaises sont, encore aujourd’hui, des véritables mouroirs où un séjour prolongé équivaut à une condamnation à mort. Ce fut le cas de l’ancien député de l’opposition Pierre-Jacques Chalupa, atteint par une grave maladie diagnostiquée pendant sa détention et qui mourut quelques temps après à cause du manque total de prise en charge sanitaire pendant sa détention. Malheureusement, cette terrible réalité est restée la même, encore aujourd’hui et il faut la dénoncer car elle déshonore notre pays. Les premières années de mon séjour au Centre Pénitentiaire de Rééducation de Kinshasa, CPRK, mieux connu comme Prison de Makala, est certainement la représentation la plus proche que je puisse imaginer de l’enfer sur terre. Pendant les premières années d’emprisonnement, j’étais placé dans un statut de prisonnier “spécial” avec des privations importantes de mon droit de visite et du minimum de “confort” qu’on peut bâtir en enfer. Le fonctionnement de cette prison congolaise est basé sur une grande autogestion de la part des prisonniers sur d’autres prisonniers, ce qui expose tout le monde au "rackettage" des condamnés à des lourdes peines - peine de mort ou perpétuité - qui, concrètement, contrôlent la prison, avec les dérives qu’on peut bien imaginer. Vu que les rations alimentaires sont presque inexistantes, dégoûtantes et irrégulièrement servies, ceux qui en ont les moyens s’organisent pour recevoir leur nourriture directement des familles qui, pour la faire entrer, sont soumises à un paiement à l’entrée du pavillon. Vu que l’eau aussi est insuffisante, les familles sont obligées aussi à envoyer de l’eau aux prisonniers, étouffés par une présence de détenus jusqu’à 1000% supérieure à la capacité normale du centre de détention. Personne ne s’occupe des malades et le dispensaire de la prison est pratiquement vide: pas de médicaments, d’analgésiques ou même le minimum pour poser des actes médicaux de base comme une perfusion. La Croix Rouge ne s’occupe pas des malades mais plutôt des morts, qui sont évacués au rythme de un ou deux par jour. Quand j’étais tombé malade, la première fois, mon épouse, accompagnée de Mme Mokia, demanda l’intervention de la Croix Rouge, vu que le dispensaire de la prison n’arrivait pas à me prendre en charge correctement et la réponse dramatique obtenue des dirigeants de la Croix Rouge Internationale fut sidérante: ” Nous ne pouvons pas nous occuper des vivants car nous sommes débordés pour évacuer les morts”. Les coupures de courant sont tellement fréquentes que ceux qui s'organisent pour se préparer un repas sur place sont obligés de jeûner ou, souvent, de se cotiser pour remplacer les câbles électriques vétustes. Tout est possible dans l’enfer de Makala, surtout si vous êtes un homme à abattre. En ce qui me concerne, j’ai été victime de tentatives illégales d'extraction par des agents des services de sécurité.
La première fois, le 07 avril 2015, un groupe de policiers et d’autres personnes en habits civils non autrement identifiés, s’infiltrèrent dans la prison de Makala la nuit - ce qui est normalement interdit - sans aucun document valable et demandant de m'évacuer vers...une destination inconnue. La solidarité qui règne dans ce milieu me sauva probablement la vie, car je refusai de suivre mes bourreaux nocturnes. Ma ferme et bruyante résistance réveilla les autres prisonniers de mon pavillon - en majorité des prisonniers politiques, comme moi - qui commencèrent à protester et faire du bruit au point que mon extraction suspecte fut abandonnée par mes bourreaux, pour crainte d'une émeute dans la prison. Un des mes avocats, Me Mutombo, du cabinet Kapiamba, qui protesta le lendemain par écrit avec la direction de la prison pour cette tentative irrégulière de transfert de ma personne vers une destination inconnue, fut lui aussi arrêté et détenu pendant une journée à la prison de Makala, au moment du dépôt du courrier, seulement pour avoir protesté par écrit contre cette procédure illégale qui menaçait ma sécurité.
La deuxième tentative d’extraction correspond avec la célèbre attaque de la prison de Makala, la nuit, le 17 mai 2017, par un commando lourdement armé qui prit d' assaut la prison, entrant “manu militari” et passant dans tous les pavillons - selon le témoignage de plusieurs détenus - à la recherche des prisonniers politiques. Ces curieux “libérateurs” interrogeaient les autres prisonniers pour nous localiser à l’intérieur de Makala: ils voulaient absolument connaître notre pavillon, notre numéro de cellule et ainsi de suite. En particulier, les assaillants me cherchaient partout sur place alors qu’en ce moment j'étais hospitalisé dans une clinique de Kinshasa. Le seul prisonnier d’opinion qui s’aventura avec les assaillants fut Ne Mwanda Nsemi, ancien député, qui s'enfuit avant que la garde républicaine n’intervienne pour reprendre le contrôle de Makala, après plusieurs heures d'émeutes et quelques centaines de morts, surtout parmi les prisonniers. Ne Mwanda Nsemi négocia, par la suite, avec le régime Kabila, sa mise en liberté, après avoir été reconduit brièvement à la prison de Makala. Sur le papier, le bâtiment de la prison de Makala est placé sous la garde d’un bataillon de la Police d’intervention rapide (PIR) – entre 700 et 1 200 hommes. Mais, en pratique, les effectifs se limitent le plus souvent à un détachement de quelque 170 éléments. Sauf que, cette nuit-là, on ne comptait qu’une soixantaine de policiers présents. Mal payés, privés de rations alimentaires dignes de ce nom, les policiers en faction abandonnent régulièrement leur poste pour se procurer à manger. Nous, les prisonniers politiques, n’écoutâmes pas les sirènes de ces “libérateurs” inconnus, très bien armés, ouvertement en mission de repérage, qui, une fois à l'extérieur, auraient pu nous exécuter, prétextant notre fuite ou donnant le prétexte à la garde républicaine de le faire. Nous restâmes tous enfermés dans nos cellules respectives et ceux qui étaient hospitalisés dans leurs chambres, tous refusant de nous lancer dans cette dangereuse aventure qui semblait nous viser particulièrement…Quoi qu’il en soit, les autorités congolaises n’ont pas été en mesure d’expliquer comment 5 000 autres prisonniers, selon les déclarations du ministre de la Justice de l' époque, se soient volatilisés, cette nuit-là et la vraie identité du commando armé qui avait pris d’assaut la prison de Makala. Néanmoins, cette évasion mettait à nu les “dysfonctionnements” sécuritaires au sein de cette prison. Un euphémisme, quand on sait que le camp militaire Kokolo, l’un des plus importants du pays, se trouve à trente minutes à pied de la prison. Il aura fallu quatre heures à ses effectifs pour se risquer autour de Makala. Donc, il y a une seule déduction possible: pour une raison qui ne sera pas élucidée, on a laissé faire les assaillants…. La commission d’enquête mise en place pour éclaircir ces événements gravissimes n’a jamais rendu public le résultat de son rapport. Personnellement, j’estime qu’on visait le fameux “groupe parlementaire” de la prison de Makala, dont je faisais partie, qui embarrassait à tel point le régime Kabila que celui-ci était prêt à tout pour s’en débarrasser ou, au moins, les traiter comme des fugitifs obligés à évoluer dans la clandestinité.

Certes, ce qui se passa dans cette prison, pendant mon séjour, fut au-delà de toute imagination. Il faut avouer que moi aussi j’y ajoutais, de temps en temps, mon esprit de révolte, encore plus fort car j’étais innocent et victime d’une injustice. En 2014, par exemple, j’ai eu la témérité d’accepter de donner un interview que François Soudan, journaliste de Radio France Internationale, avait sollicité à un cadre de mon parti et cela, à partir de la prison! Le jour prévu, le 24 juillet 2013, François Soudan, grâce au téléphone d’un visiteur, me posa des questions, en direct, sur mon emprisonnement politique, sur les enjeux du moment et le message que je voulais envoyer aux congolais, ce que j’avais bien accepté de faire, tout en étant prêt à en subir les conséquences. J’avais quand même secoué le cocotier, si le porte-parole du Gouvernement, le très zélé M. Lamberte Mende, s’empressa le lendemain de réagir à mes déclarations, dont la plus dérangeante pour lui, était que j’étais le “prisonnier personnel” du président de l’époque. S'ensuivit une semaine d’isolement, de privation de nourriture et tout ce que je possédais dans ma cellule fut volé et séquestré. Mais le pire qui puisse arriver, dans l’enfer de Makala, est de tomber malade, ce qui est inévitable à cause de l’insalubrité ambiante. Le nombre de morts par jour est dramatiquement élevé, à cause des services hygiéniques insalubres et insuffisants, le manque de nourriture et la surpopulation qui rend le paludisme endémique. Cette réalité inhumaine doit changer: il est intolérable que des congolais meurent par centaines dans les prisons-mouroirs congolaises! Depuis janvier 2023 jusqu’à novembre 2023, la fondation Bill Clinton pour la paix a compté 432 détenus morts à l’intérieur de la prison de Makala. Le système de l’autogestion interne est une source d’exploitation et d’abus, surtout des prisonniers les plus violents et dangereux sur les plus pauvres. Cette situation scandaleuse du système pénitentiaire congolais doit interpeller l’opinion publique, pour exiger le respect des droits humains et mettre un terme immédiatement, entre autres, à l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques. Malgré les petits travaux effectués, de temps en temps, par quelques directions de prison un peu plus consciencieuses que les autres, la surpopulation extrême transforme les pénitentiaires congolais en des enfers sur terre, dans l’indifférence des exécutifs congolais. Depuis janvier 2023 jusqu’à novembre 2023, la fondation Bill Clinton pour la paix a compté 432 détenus morts à l’intérieur de la prison de Makala. Le système de l’autogestion interne est une source d’exploitation et d’abus, surtout des prisonniers les plus violents et dangereux sur les plus pauvres. Cette situation scandaleuse du système pénitentiaire congolais doit interpeller l’opinion publique, pour exiger le respect des droits humains et mettre un terme immédiatement, entre autres, à l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques.

https://morebooks.shop/shop-ui/shop/product/978-620-6-71304-3… #rdc #rdcongo #makala

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KOTA
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ATTAQUE DE LA PRISON DE MAKALA, quand l' histoire bégaye: 17/05/2017 - 02/09/2024 Empty Re: ATTAQUE DE LA PRISON DE MAKALA, quand l' histoire bégaye: 17/05/2017 - 02/09/2024

Message  KOTA 9/9/2024, 4:23 pm

Human Rights Watch, dans son rapport sur le massacre à Makala:
"Les bâtiments administratifs de la prison ont été détruits, y compris ses archives, ce qui crée d’importantes difficultés pour déterminer le nombre exact ainsi que l’identité des personnes qui y étaient détenues". #rdcongo #rdc #HRW

Un élément de plus qui augmente le parallélisme de 2017: en 2017, l' enquête sur l évasion de masse et les tueries de Makala ne fut jamais rendue publique et celle de 2024 ne nous dira, non plus, pourquoi on a voulu exfiltrer des prisonniers la nuit et leurs identités, selon les déclarations du Ministre de la Justice qui, depuis l 'aéroport, à son arrivée à Kinshasa, avait parlé "d exfiltration de prisonniers": qui a donné cet ordre et pourquoi?
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