Rapport de la Haut-Commissaire des Nations Unies
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09042010
Rapport de la Haut-Commissaire des Nations Unies
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I. Principaux faits nouveaux survenus dans le domaine des droits de l’homme
1. Au cours de la période considérée, le peuple congolais a souffert de violations des
droits de l’homme généralisées, en rapport avec les conflits armés, surtout dans les
provinces de l’est, sans compter les violations commises pour des raisons d’ordre structurel
et politique sur l’ensemble du territoire. Les militants des droits de l’homme et les
journalistes continuent d’être la cible d’actes d’intimidation et de menaces d’un bout à
l’autre du pays. Les viols et autres violences sexuelles demeurent aussi un sujet de vive
préoccupation.
2. Ces derniers mois, les Forces armées de la République démocratique du Congo
(FARDC) et la Police nationale congolaise (PNC) ont commis de nombreuses violations
des droits de l’homme et se sont livrées notamment à des exécutions arbitraires, à des viols,
à des arrestations et détentions arbitraires, à des actes de torture, à des traitements cruels,
inhumains ou dégradants de civils, au travail forcé, au pillage et à l’exploitation illégale des
ressources naturelles. Les violations perpétrées par les FARDC dans le cadre de l’opération
Kimia II sont particulièrement préoccupantes. Ainsi, à l’occasion d’une mission d’enquête à
Nyabiondo, sur le territoire de Masisi, dans le Nord-Kivu, le Bureau conjoint des Nations
Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo (dénommé
ci-après le «Bureau conjoint») a pu confirmer qu’entre mai et septembre 2009 les FARDC
qui avaient participé à l’opération Kimia II avaient tué au moins 62 personnes et que
8 autres avaient disparu de plusieurs villages des alentours de Nyabiondo. Selon des
témoignages dignes de foi, le nombre de morts pourrait être beaucoup plus élevé encore.
On possédait des preuves sur des cas de viols, de travail forcé généralisé, d’extorsion et
d’arrestations arbitraires dont les FARDC étaient responsables en plus de ces assassinats.
Suite aux conclusions préliminaires de cette enquête, le 1er novembre 2009, l’Organisation
des Nations Unies a suspendu son soutien logistique et opérationnel à l’unité des forces
armées congolaises qui aurait été impliquée dans les massacres.
3. Des groupes armés, comme les Forces démocratiques de libération du Rwanda
(FDLR) et l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), qui opèrent dans l’est du pays, ont
perpétré de graves violations des droits de l’homme contre la population locale au cours des
derniers mois, dont des massacres, des viols massifs, le recrutement forcé dans des groupes
armés et le pillage. La LRA continue de commettre des violations et notamment de se livrer
à l’exécution de civils3, à des enlèvements et à des violences sexuelles contre la population
civile des districts du Haut et du Bas-Uélé dans la province orientale.
II. Mesures prises et réaction aux recommandations
Recommandations existantes
4. Le Gouvernement devrait limiter au strict minimum le nombre de forces et de
services de sécurité dotés de pouvoirs d’arrestation, de détention et d’enquête et veiller à ce
que la police reste la principale institution responsable du maintien de l’ordre. De plus, il
devrait prendre des mesures pour garantir que toute personne arrêtée soit enregistrée formellement et conduite devant un juge et assurer son droit à recevoir l’assistance d’un avocat de son choix, à être examinée par un médecin et à contacter sa famille ou les personnes de son choix. En outre, le Bureau conjoint devrait avoir accès sans entraves à toutes les prisons et à tous les centres de détention conformément au mandat confié à la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) et à la directive présidentielle datée du 5 juillet 2005. Enfin, le Gouvernement devrait enquêter de manière approfondie sur tous les cas de détention arbitraire signalés,
engager des poursuites contre les responsables et indemniser pleinement les victimes
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
5. D’après les renseignements reçus, le Gouvernement n’a pas pris de mesures
particulières pour mettre les recommandations ci-dessus en oeuvre. À l’heure où le présent
rapport était établi, plusieurs branches du pouvoir exécutif, les forces de sécurité et les
autorités judiciaires continuaient de procéder à des arrestations et détentions arbitraires et
illégales dans le pays. Des individus ont aussi été arrêtés pour des raisons sans aucun
rapport avec le droit pénal. Des travailleurs des droits de l’homme découvrent
régulièrement en détention des personnes qui y ont été placées pour non-remboursement de
dettes ou conflit foncier. Le Bureau conjoint a aussi constaté que la PNC avait tendance à
arrêter des membres de la famille ou des proches de personnes soupçonnées d’actes
criminels lorsqu’elle ne pouvait pas localiser l’intéressé, sans les inculper ni posséder de
preuves que ces individus étaient impliqués dans les faits en cause. Des agents du service
de renseignements de l’État (Agence nationale de renseignements − ANR) arrêtent eux
aussi souvent des personnes accusées d’infractions de droit commun qui n’ont rien à voir
avec la sûreté de l’État. Enfin, des éléments des forces de sécurité, de l’ANR notamment,
ont aussi été impliqués dans des atteintes aux droits de l’homme motivées par des raisons
d’ordre politique et ciblant des opposants politiques, des journalistes et des défenseurs des
droits de l’homme.
6. Après leur arrestation, les personnes placées en détention se voient régulièrement
refuser les garanties que leur reconnaît le droit congolais. En particulier, elles ne sont
généralement pas enregistrées en bonne et due forme et par conséquent les dossiers sont
souvent incomplets ou ne sont pas mis à jour. Rares sont les détenus déférés devant un juge
dans les quarante-huit heures qui suivent leur arrestation comme le prévoit la Constitution,
d’où la multiplication d’«hébergés», c’est-à-dire de détenus qui n’ont pas été inculpés
officiellement. De plus, très rares sont les cas renvoyés devant le procureur public ou
militaire et de nombreux détenus sont libérés après avoir versé une amende dont il n’est pas
fait officiellement état dans le dossier.
Mesures prises par le Bureau conjoint
7. Le Bureau conjoint a pris des mesures contre les arrestations et détentions arbitraires
ou illégales pour essayer d’inciter le Gouvernement à assurer aux détenus la protection à
laquelle ils sont en droit de prétendre aux termes du droit congolais et du droit international
des droits de l’homme. Pendant la période considérée, du personnel du Bureau conjoint a
visité de nombreuses cellules de détention et prisons dans le pays, dans plusieurs cas
accompagné de procureurs nationaux, afin de vérifier la légalité des détentions, et a obtenu
la libération de dizaines de personnes qui avaient été placées illégalement en détention.
Après que le Bureau conjoint eut demandé aux autorités judiciaires et policières de notifier
à tous les détenus leurs droits et les chefs d’inculpation qui pesaient contre eux,
le Procureur général a exigé de tous les personnels qui procédaient à des placements en
détention qu’ils informent les intéressés des chefs d’inculpation retenus contre eux. Cela
dit, cette consigne est rarement suivie dans la pratique. De même, pendant la période
considérée, le Bureau conjoint a organisé plusieurs ateliers et activités de sensibilisation à
l’intention des forces de sécurité congolaises pour les inciter à mieux respecter les droits de
l’homme. Il faudrait rappeler que le Bureau conjoint et d’autres acteurs des droits de
l’homme n’ont toujours pas accès à un certain nombre de lieux de détention, dont le camp
militaire de Tshatshi, l’état-major du renseignement militaire à Kinshasa et la plupart des
centres de détention de l’ANR du pays, en dépit des instructions données en juillet 2005
aux autorités compétentes par le Président de la République démocratique du Congo.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
8. Les arrestations et détentions arbitraires et illégales répondent souvent à des
préoccupations d’ordre lucratif. La plupart du temps, ces affaires ne parviennent pas
jusqu’à l’appareil judiciaire et aboutissent à un marchandage, se soldant par un arrangement
avec l’agent qui a procédé à l’arrestation et qui contraint la victime ou sa famille à lui
verser un pot-de-vin en échange de sa liberté. Par crainte de représailles ou d’une nouvelle arrestation, peu de personnes portent ensuite plainte après avoir été libérées. D’autres détentions illégales sont motivées par des raisons d’ordre politique. Ces deux types de problèmes sont exacerbés par le dysfonctionnement du système de justice pénale.
B. Conditions carcérales, torture et mauvais traitements en détention
Recommandations existantes
9. Il faudrait prendre immédiatement des mesures pour réduire la surpopulation carcérale, remédier aux conditions de détention inhumaines et améliorer la sécurité dans tous les établissements. Par ailleurs, il faudrait adopter des mesures législatives pour appliquer la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il faudrait prendre des mesures efficaces pour prévenir tout acte de torture ou de maltraitance. Des enquêtes rapides, impartiales et approfondies sur les actes de torture et les mauvais traitements signalés devraient être entreprises et les auteurs de tels actes condamnés en bonne et due forme et obligés d’indemniser leurs victimes. De plus, le Gouvernement devrait prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que toutes les personnes qui signalent des actes de torture ou des mauvais traitements soient protégées contre les menaces ou les actes d’intimidation.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
10. Pendant la période considérée, le Gouvernement n’a guère fait de progrès dans l’élaboration d’une politique de nature à rendre les prisons plus autosuffisantes. Le nouveau Plan stratégique de réforme des prisons mis au point par le Ministère de la justice avec le soutien de la Division de l’état de droit de la MONUC est à l’examen. La majorité des prisons se caractérisent par leur délabrement, l’état d’inanition des détenus et l’incidence des maladies. Cet état de choses revient à infliger un traitement cruel, inhumain ou dégradant aux détenus et ne répond pas aux normes internationales élémentaires qui veulent que toute personne privée de liberté soit traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine8. Des conditions de détention désastreuses entraînent un taux de mortalité extrêmement élevé dans la population carcérale. Quarante quatre personnes seraient décédées en détention au Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK) entre janvier et août 2009, essentiellement faute de nourriture et de médicaments.
11. La surpopulation, qui s’explique surtout par un recours abusif à la détention provisoire, demeure un problème majeur dans les prisons du pays. Les condamnés et les prévenus, les adultes et les mineurs sont souvent détenus dans les mêmes quartiers. Les autorités ont cependant pris quelques mesures pour réduire la surpopulation. Ainsi, au CPRK, elles ont libéré, pour bonne conduite, des détenus qui avaient exécuté au moins un quart de leur peine. Il reste que l’on peut être préoccupé par le fait que des auteurs de viol,
de violences sexuelles et d’autres atteintes aux droits de l’homme ont eux aussi bénéficié de cette mesure. Vu les protestations suscitées par l’élargissement d’auteurs de violences sexuelles, le Ministre de la justice a annoncé, en octobre 2009, qu’un projet de loi dont le but était d’exclure les auteurs de sévices sexuels du bénéfice d’une libération conditionnelle était en cours de rédaction.
12. En raison de l’insécurité, d’une infrastructure délabrée, de la corruption et de la lenteur des procédures judiciaires, des prévenus et des condamnés, dont des criminels très connus, s’évadent régulièrement de prison. Entre mars et novembre 2009, 135 détenus se sont enfuis de la prison de Mahagi, dans le district d’Ituri, dans la province orientale. La fréquence des évasions des prisons congolaises mine sérieusement la lutte contre l’impunité. Dans certains cas, des mesures sont prises contre l’encadrement accusé de les
avoir facilitées: le directeur de la prison de Mahagi a été arrêté le 3 juillet 2009 et le commissaire de police adjoint du poste de police de Gwoknyeri (à 27 kilomètres de Mahagi) a été arrêté le 10 juin 2009.
13. Le Parlement n’a toujours pas adopté de loi érigeant la torture en infraction et les
personnes placées en détention provisoire sont encore souvent soumises à la torture et à d’autres formes de traitements cruels, inhumains et dégradants par la PNC, l’ANL et les FARDC. Les mauvais traitements se produisent à différents stades de la détention − au moment de l’arrestation, pendant l’interrogatoire et pendant la détention provisoire − et entraînent souvent la mort ou des lésions graves. Le 16 juin 2009 par exemple, un détenu est décédé dans une prison du groupement de Bena Mpiana, sur le territoire de Ngandajika, dans le Kasaï oriental, après avoir été arrêté et frappé par des agents de la PNC parce qu’il portait «illégalement» des chaussures de «policier». Pendant la période considérée, quelques rares enquêtes et procès ont eu lieu suite à des actes de torture et des mauvais traitements signalés. Le Gouvernement n’a rien fait pour veiller à ce que les personnes qui dénonçaient des actes de torture et des mauvais traitements soient toutes protégées contre les menaces et les actes d’intimidation.
Mesures prises par le Bureau conjoint
14. Pendant la période considérée, du personnel du Bureau conjoint a continué de visiter fréquemment des prisons aux quatre coins du pays, y compris en compagnie du Ministre des droits de l’homme de certaines provinces, et a réuni des informations sur les cellules délabrées, l’absence de nourriture et de soins médicaux, la corruption et le manque de qualifications du personnel pénitentiaire. S’agissant de l’insécurité alimentaire, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) intervient lorsque 30 % de la population d’un centre de détention souffre de malnutrition. Il fournit suffisamment de nourriture pour surmonter le problème dans huit centres, d’où une baisse des décès par malnutrition en détention. Cela dit, le Bureau conjoint craint que l’assistance du CICR n’ait incité le Gouvernement qui faisait déjà très peu à en faire encore moins. Le Bureau conjoint a poursuivi ses activités de sensibilisation et a continué de promouvoir l’adoption d’une loi criminalisant la torture. À l’occasion de la célébration de la Journée internationale des
Nations Unies pour le soutien aux victimes de la torture le 26 juin 2009, il a organisé un certain nombre d’activités. De plus, en partenariat avec Avocats sans frontières (AsF), il facilite la mise en oeuvre de décisions prises par le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture. En octobre 2009, en coopération avec le Ministère de la justice et les autorités judiciaires, il a organisé un atelier sur l’appareil judiciaire et le problème de la torture et de la mort en prison. À cet atelier, les participants ont demandé au Procureur général de la République près la Cour suprême de rédiger une directive à l’intention des procureurs sur la nécessité d’enquêter effectivement sur les cas de torture et de décès en prison. Cette directive est actuellement en cours de rédaction avec l’assistance du Bureau conjoint. Celui-ci continue activement de plaider pour une autosuffisance accrue des prisons.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
15. Dans sa majeure partie, le personnel pénitentiaire ne fait pas l’objet de recrutement systématique, ne suit pas de formation et n’est pas rémunéré. Qui plus est, le Gouvernement ne prévoit pas un financement suffisant pour les prisons et centres de détention. Il semble peu disposé à remédier à la situation des prisons et à engager les réformes nécessaires, de crainte de bouleverser les circuits de corruption qui se sont mis en place autour de la «privatisation» de la fonction pénitentiaire. La création d’exploitations agricoles pénitentiaires destinées à garantir l’approvisionnement alimentaire et la fourniture de médicaments de base pour prévenir les épidémies sont des mesures nécessaires, mais la «privatisation» de la fonction d’État a gêné ces quelques efforts. En ce qui concerne l’application de la Convention contre la torture, l’adoption des textes de loi nécessaires a connu des retards, dus principalement à l’actuel arriéré législatif. Le fait que les autorités n’engagent pas de poursuites contre les auteurs d’actes de torture est un exemple de plus de l’impunité chronique qui continue de sévir dans le pays. Des années de gouvernance au mieux indifférente et au pire menaçante font que les victimes congolaises de violations des droits de l’homme commises par des agents de l’État ont culturellement la conviction qu’il serait vain de se plaindre parce qu’elles auraient à faire face soit à de l’inaction, soit à des représailles.
C. Violences sexuelles et impunité
Recommandations existantes
16. Il faudrait abolir toutes les dispositions du droit congolais de caractère discriminatoire à l’égard des femmes. La réforme globale du Code de la famille et l’adoption de la loi relative à l’égalité entre les sexes, mettant en oeuvre l’article 14 de la Constitution, devraient constituer deux mesures législatives phares. Pour ce qui est des violences sexuelles, les institutions publiques devraient dénoncer publiquement et sans ambiguïté toutes les formes de violence à l’égard des femmes, y compris les violences conjugales, le viol conjugal et le harcèlement sexuel. Ces dénonciations ne devraient pas être tempérées par des allusions à la coutume, à la tradition ou à des considérations d’ordre religieux pour justifier ou excuser ce type de violence. Le Gouvernement devrait veiller à ce que les personnels des forces de sécurité de l’État connaissent et respectent la loi relative aux violences sexuelles et à ce que le système judiciaire permette de traduire les auteurs de violations en justice sans retard ni partialité. De plus, il devrait mettre en place et promouvoir un mécanisme efficace chargé de recevoir les plaintes pour violence sexuelle, y compris au sein du système pénitentiaire, d’enquêter sur ces plaintes et de fournir aux victimes des soins psychologiques et médicaux. Enfin, il devrait verser des dommages et intérêts à toutes les victimes de violences sexuelles commises par des agents de l’État et ouvrir un fonds à cet effet dans le budget national.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
17. Le nombre de cas de violences sexuelles enregistrés par le Bureau conjoint est
demeuré extrêmement élevé pendant la période à l’examen. Ces cas ne sont pas limités aux
zones de conflit armé mais se produisent partout dans le pays. Faute de sécurité et par
manque de séparation entre les détenus, les femmes placées en détention courent des
risques particuliers de violences sexuelles. À titre d’exemple, dans la nuit du 20 au 21 juin
2009, alors qu’il se produisait une tentative d’évasion à la prison de Goma, 23 femmes ont
été violées par des codétenus. La plupart des viols sont certes commis par des éléments de
groupes armés et des FARDC et de la PNC, mais le Bureau conjoint a recueilli des
informations sur un nombre impressionnant et croissant de faits commis par des civils.
18. Des initiatives prometteuses prises par le Gouvernement contre les violences
sexuelles, comme les lois relatives aux violences sexuelles adoptées le 20 juillet 2006, qui
ont considérablement amélioré le Code pénal et le Code de procédure pénale congolais,
n’ont pas produit les changements escomptés. Si les auteurs de viol sont jugés et reconnus
coupables, ils sont rarement condamnés à des peines allant jusqu’à cinq ans de prison et
l’État a rarement versé des dommages et intérêts aux victimes quand bien même ordre lui
est régulièrement donné de le faire. En juin 2009, le tribunal de grande instance de Mbuji
Mayi a statué dans 11 affaires de viol, mais a rendu une seule peine de prison supérieure à
cinq ans. Les autres peines allaient de trois à vingt-quatre mois. Même si les victimes se
voient accorder des dommages et intérêts pour des exactions commises par des agents de
l’État, le Gouvernement ne s’acquitte pas de la somme qu’il est tenu de verser à titre de
dommages et intérêts.
19. Le 25 novembre 2009, le Gouvernement a fait un pas en avant en lançant sa stratégie
nationale de lutte contre les violences sexuelles qui sera mise en application avec le soutien
du système des Nations Unies dans le pays. Il a mis au point une stratégie qui vise à
prévenir, corriger et atténuer les effets des violences sexuelles dans les zones de conflit et
reprend la stratégie globale de lutte contre les violences sexuelles en République
démocratique du Congo. Le Ministère du genre, de la famille et de l’enfant élabore aussi
actuellement des textes tendant à réformer le Code de la famille et à mettre en oeuvre la
disposition constitutionnelle relative à l’égalité des sexes.
20. Le 5 juillet 2009, le Président a déclaré une politique de tolérance zéro à l’égard des
auteurs de violations des droits de l’homme, des violeurs en particulier, au sein des forces
de sécurité congolaises. Le 31 juillet 2009, par exemple, la cour militaire du Kasaï oriental
a confirmé en appel la condamnation d’un inspecteur du bureau du procureur militaire de
Lodja, du district de Sankuru, dans le Kasaï oriental, pour le viol d’une mineure en
décembre 2007. L’intéressé à été condamné à vingt ans de servitude pénale et à une amende
de 100 000 francs congolais. Malgré quelques résultats positifs enregistrés en ce qui
concerne le procès et la condamnation de simples soldats et d’agents de police subalternes,
la plupart du temps, les crimes sexuels demeurent impunis. Les autorités congolaises n’ont
guère progressé dans l’arrestation et la poursuite des éléments des FARDC, en particulier
des officiers supérieurs, sur lesquels pèsent des soupçons. Au moment de la visite du
Conseil de sécurité en République démocratique du Congo en mai 2009, une liste de cinq officiers supérieurs accusés de viol a été remise aux autorités, dont le Président de la République démocratique du Congo. Malgré cette sensibilisation au plus haut niveau de l’État, peu de progrès ont été réalisés au cours des six mois qui ont suivi. Bien que deux de ces cinq officiers aient été placés en détention, aucun chef d’inculpation n’a été porté contre eux.
21. Des membres de groupes armés non intégrés continuent aussi de violer. Le 3 juin
2009, 5 miliciens Maï Maï qui avaient violé 135 femmes en juillet 2007 à Lieke Lesole, sur
le territoire d’Opala, dans la province orientale, ont été reconnus coupables de crimes
contre l’humanité, y compris de viol avec violence, et condamnés par le tribunal militaire
de Kisangani à des peines allant de trente ans de prison à la servitude pénale à perpétuité.
Les miliciens ont été aussi condamnés in solidum avec l’État à verser 2 500 dollars des
États-Unis de dommages et intérêts à chacune des victimes de coups et blessures et 10 000 dollars de dommages et intérêts à chacune des victimes de viol. Le jugement de Lieke Lesole marque un jalon dans l’histoire des réparations accordées à des victimes, mais malheureusement aucune somme n’a encore été versée.
Mesures prises par le Bureau conjoint
22. Le Bureau conjoint a poursuivi ses activités de renforcement des capacités et d’autonomisation dans la lutte contre les violences sexuelles. Dans le cadre du plan national contre les violences sexuelles, il est chargé de coordonner cette composante de la lutte contre l’impunité. Le programme du Bureau conjoint vise à saper l’impunité dont bénéficient les auteurs de violences sexuelles en apportant une assistance juridique aux victimes au moyen de permanences d’aide juridictionnelle mises en place dans plusieurs
provinces. Pour compléter ce programme, le Bureau conjoint fournit un soutien en termes d’allocations de mission aux procureurs militaires pour faciliter les enquêtes; il assure le transport jusqu’aux tribunaux du personnel judiciaire, des victimes et de leurs conseillers, il réunit des informations et intervient pour améliorer la situation. Il a aussi organisé des sessions de formation avec des acteurs étatiques et non étatiques. Par ailleurs, il a suivi de près et signalé des cas de violences sexuelles et fait le nécessaire pour que les responsables, en particulier les éléments des forces de sécurité, soient poursuivis, et a offert son aide au procureur militaire aux fins de l’enquête qu’il a fallu engager pour traduire en justice des officiers supérieurs. Dernièrement, il a mis au point un programme national d’accès à la justice pour les victimes de violences sexuelles avec le concours de plusieurs bailleurs de fonds. Une initiative pilote de défense des droits des victimes de violences sexuelles, y compris moyennant l’évaluation des mécanismes existants de recours et de réparation à la disposition des victimes, est aussi en cours d’élaboration.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
23. L’impunité des auteurs de crimes de violences sexuelles est chronique. Les personnes haut placées sont rarement poursuivies et, même si elles le sont, le secteur de la
justice manque si cruellement de crédits et de personnel que les procédures judiciaires sont
nécessairement lentes. Il arrive souvent que des personnalités − et en fait tout accusé qui en
a les moyens − monnaient leur sortie de prison. Qui plus est, des auteurs de violations
présumées «s’évadent» régulièrement de prison. D’autres facteurs font obstacle à
l’amélioration du sort des victimes, comme l’influence de coutumes locales et la crainte de
la victime d’être rejetée par sa famille et sa communauté. L’État ne s’attaque pas
véritablement aux racines sexospécifiques des violences sexuelles, à savoir l’infériorité
sociale, économique et politique des femmes dans la société congolaise. Les victimes
rencontrent aussi d’énormes difficultés pour accéder à la justice à cause des frais de justice
élevés, des règlements à l’amiable, des pressions et des menaces qui s’exercent sur elles et
de l’ignorance de la loi parmi les policiers des zones rurales. Tous ces facteurs contribuent
au climat d’impunité dont bénéficient les crimes commis à l’encontre des femmes.
D. Violation des droits économiques et sociaux et exploitation illégale
des ressources naturelles
Recommandations existantes
24. Dans le domaine des droits économiques et sociaux, il faudrait prendre des mesures
globales suffisantes pour remédier à l’exploitation illicite des ressources naturelles dans le
pays. Le Gouvernement devrait accroître la transparence de la collecte des ressources de
l’État, en particulier en procédant à la cartographie des recettes provenant d’acteurs qui
exploitent des zones riches en minerais, dans la ligne de l’Initiative de transparence des
industries extractives, et en distribuant les recettes conformément au devoir qui est le sien
de tirer le meilleur usage de ses ressources en vue de la réalisation progressive des droits de l’homme. Le Gouvernement est effectivement tenu d’utiliser ses recettes pour garantir le
libre accès de tous les enfants à l’enseignement primaire, assurer l’accès à des soins de santé de base à un coût abordable et veiller à ce que les centres de santé et les hôpitaux disposent de ressources humaines, médicales et financières. À sa quarante-troisième session, en novembre 2009, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le rapport de la République démocratique du Congo et rappelé entre autres la nécessité pour l’État partie de promouvoir la bonne gouvernance et de combattre la corruption ainsi que de prendre toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que ses ressources naturelles ne soient pas soumises à l’exploitation illégale et à la mauvaise gestion.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
25. Les autorités centrales et locales n’assurent pas l’exercice des droits économiques et sociaux et les efforts consentis jusqu’ici pour améliorer la situation ne répondent pas aux besoins. Le fait que le Gouvernement ne recueille ni ne distribue suffisamment de ressources continue de causer des violations des droits de l’homme d’ordre structurel et est source de corruption à travers le pays, dans la mesure où des fonctionnaires qui ne sont pas payés ou sont sous-payés extorquent de l’argent à la population dans l’exercice de leurs fonctions. Bien que le Gouvernement affirme respecter l’Initiative de transparence des industries extractives, dans la pratique la transparence n’est qu’illusion. Les sociétés privées comme les établissements publics révèlent rarement les profits réalisés et les autorités ne tiennent pas les acteurs étatiques ou non étatiques responsables du rôle qui est le leur dans l’exploitation illégale des ressources naturelles. Ce secteur déréglementé est aussi le premier à recruter et exploiter la main-d’oeuvre du pays. Les employés des services sociaux censés protéger le droit du travail, comme les inspecteurs du travail, sacrifient souvent les droits des travailleurs au profit de leur propre intérêt, empochant l’argent qui leur permettra de survivre. Par ailleurs, des sociétés privées ont procédé à des licenciements massifs au mépris total des règles et procédures en vigueur.
26. La République démocratique du Congo est souvent citée en tant qu’exemple du
«paradoxe des richesses». Alors que le pays regorge de ressources naturelles (il recèle par
exemple 80 % des ressources mondiales de coltan et 10 % de celles de cuivre), la
population vit dans une extrême pauvreté (80 % de la population congolaise vit avec moins
de 0,20 dollar des États-Unis par jour)11. Dans les provinces d’où sont extraites des
ressources minières, on a continué de signaler des problèmes de sécurité et des violations
des droits de l’homme en rapport avec l’extraction des ressources. Des affrontements entre
groupes rebelles et forces gouvernementales pour gagner le contrôle de sites miniers sont fréquents. En août 2009, les FDLR et les Maï Maï Shikito ont attaqué une mine placée sous la protection des forces gouvernementales à Omata, sur le territoire de Walikale, dans le Nord-Kivu, entraînant des pillages et faisant plusieurs morts et blessés parmi la population civile. De plus, les forces de sécurité gouvernementales et les forces armées irrégulières continuent de commettre des actes de violence sexuelle et de soumettre des mineurs artisanaux et d’autres civils qui vivent dans la région au travail forcé, à des impôts illégaux et à des extorsions de fonds.
27. S’agissant du droit à l’éducation, bien que l’article 43 de la Constitution prévoie un enseignement primaire public gratuit et obligatoire, les parents sont censés apporter leur cotisation au salaire des enseignants faute d’un financement suffisant de la part de l’État. L’accès à la nourriture et aux soins de santé est aussi loin de répondre aux normes minimales. Le système public de soins de santé est à peine fonctionnel et le Gouvernement est dans l’incapacité de réagir à des maladies qui accablent la population et qu’il serait pourtant possible de traiter. Comme le système des soins de santé perçoit une redevance de la part des usagers, la population la plus démunie n’y a pas accès. De ce fait, le pays enregistre des taux de mortalité maternelle et infantile parmi les plus élevés du monde.
Dans l’est du pays, le pillage systématique des centres de santé et l’obstruction arbitraire des convois humanitaires censés réapprovisionner des établissements en fournitures médicales ont aggravé la situation; par ailleurs, il est indispensable d’accroître les capacités médicales parce que de nombreux travailleurs médicaux congolais ont été contraints de fuir. Des taux de malnutrition élevés parmi les femmes, les enfants et les personnes déplacées ont rendu ces groupes de population plus vulnérables encore aux maladies infectieuses. Le sort des personnes déplacées est particulièrement préoccupant à cause de l’ampleur du problème. Ces personnes, qui ont perdu leur toit, vivent dans la misère absolue sans accès à une nourriture suffisante, ni eau potable, ni soins de santé, ni éducation pour leurs enfants.
Mesures prises par le Bureau conjoint
28. Le Bureau conjoint insiste de plus en plus sur le rapport entre l’exploitation illégale des ressources naturelles et la faible part de recettes publiques attribuée à la réalisation des droits économiques et sociaux. Il plaide pour que le Gouvernement redouble d’efforts en vue d’assurer l’exercice par tous les Congolais de leurs droits économiques et sociaux. En outre, il effectue des missions d’enquête afin de mieux comprendre les obstacles à la réglementation et à la politique relatives à l’exploitation des ressources naturelles. Il suit et évalue les progrès accomplis dans le domaine des droits économiques et sociaux. Il s’emploie à faire mieux connaître des parties prenantes l’article 2 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui pourrait servir à lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles dans le but de réaliser progressivement tous les droits de l’homme.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
29. De nombreux ministères dotés de responsabilités en matière de supervision et de collecte des recettes provenant du secteur des ressources naturelles manquent de personnel, de crédits et de capacités techniques pour s’acquitter de leurs fonctions, ce qui est source de corruption. Le Gouvernement perçoit bien moins en impôts et redevances qu’il le devrait de la part du secteur minier à cause de la corruption pratiquée à tous les niveaux. Or l’impunité est de mise pour quiconque s’adonne à la corruption parce que, la plupart du temps, elle se pratique avec l’aval ou sous les ordres du supérieur hiérarchique. Ces fonctionnaires interviennent dans l’appareil judiciaire pour bloquer les enquêtes et les poursuites dans les affaires d’exploitation illégale, de corruption et autres crimes en lien avec le secteur des ressources naturelles.
I. Principaux faits nouveaux survenus dans le domaine des droits de l’homme
1. Au cours de la période considérée, le peuple congolais a souffert de violations des
droits de l’homme généralisées, en rapport avec les conflits armés, surtout dans les
provinces de l’est, sans compter les violations commises pour des raisons d’ordre structurel
et politique sur l’ensemble du territoire. Les militants des droits de l’homme et les
journalistes continuent d’être la cible d’actes d’intimidation et de menaces d’un bout à
l’autre du pays. Les viols et autres violences sexuelles demeurent aussi un sujet de vive
préoccupation.
2. Ces derniers mois, les Forces armées de la République démocratique du Congo
(FARDC) et la Police nationale congolaise (PNC) ont commis de nombreuses violations
des droits de l’homme et se sont livrées notamment à des exécutions arbitraires, à des viols,
à des arrestations et détentions arbitraires, à des actes de torture, à des traitements cruels,
inhumains ou dégradants de civils, au travail forcé, au pillage et à l’exploitation illégale des
ressources naturelles. Les violations perpétrées par les FARDC dans le cadre de l’opération
Kimia II sont particulièrement préoccupantes. Ainsi, à l’occasion d’une mission d’enquête à
Nyabiondo, sur le territoire de Masisi, dans le Nord-Kivu, le Bureau conjoint des Nations
Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo (dénommé
ci-après le «Bureau conjoint») a pu confirmer qu’entre mai et septembre 2009 les FARDC
qui avaient participé à l’opération Kimia II avaient tué au moins 62 personnes et que
8 autres avaient disparu de plusieurs villages des alentours de Nyabiondo. Selon des
témoignages dignes de foi, le nombre de morts pourrait être beaucoup plus élevé encore.
On possédait des preuves sur des cas de viols, de travail forcé généralisé, d’extorsion et
d’arrestations arbitraires dont les FARDC étaient responsables en plus de ces assassinats.
Suite aux conclusions préliminaires de cette enquête, le 1er novembre 2009, l’Organisation
des Nations Unies a suspendu son soutien logistique et opérationnel à l’unité des forces
armées congolaises qui aurait été impliquée dans les massacres.
3. Des groupes armés, comme les Forces démocratiques de libération du Rwanda
(FDLR) et l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), qui opèrent dans l’est du pays, ont
perpétré de graves violations des droits de l’homme contre la population locale au cours des
derniers mois, dont des massacres, des viols massifs, le recrutement forcé dans des groupes
armés et le pillage. La LRA continue de commettre des violations et notamment de se livrer
à l’exécution de civils3, à des enlèvements et à des violences sexuelles contre la population
civile des districts du Haut et du Bas-Uélé dans la province orientale.
II. Mesures prises et réaction aux recommandations
- Arrestations et détentions arbitraires ou illégales
Recommandations existantes
4. Le Gouvernement devrait limiter au strict minimum le nombre de forces et de
services de sécurité dotés de pouvoirs d’arrestation, de détention et d’enquête et veiller à ce
que la police reste la principale institution responsable du maintien de l’ordre. De plus, il
devrait prendre des mesures pour garantir que toute personne arrêtée soit enregistrée formellement et conduite devant un juge et assurer son droit à recevoir l’assistance d’un avocat de son choix, à être examinée par un médecin et à contacter sa famille ou les personnes de son choix. En outre, le Bureau conjoint devrait avoir accès sans entraves à toutes les prisons et à tous les centres de détention conformément au mandat confié à la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) et à la directive présidentielle datée du 5 juillet 2005. Enfin, le Gouvernement devrait enquêter de manière approfondie sur tous les cas de détention arbitraire signalés,
engager des poursuites contre les responsables et indemniser pleinement les victimes
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
5. D’après les renseignements reçus, le Gouvernement n’a pas pris de mesures
particulières pour mettre les recommandations ci-dessus en oeuvre. À l’heure où le présent
rapport était établi, plusieurs branches du pouvoir exécutif, les forces de sécurité et les
autorités judiciaires continuaient de procéder à des arrestations et détentions arbitraires et
illégales dans le pays. Des individus ont aussi été arrêtés pour des raisons sans aucun
rapport avec le droit pénal. Des travailleurs des droits de l’homme découvrent
régulièrement en détention des personnes qui y ont été placées pour non-remboursement de
dettes ou conflit foncier. Le Bureau conjoint a aussi constaté que la PNC avait tendance à
arrêter des membres de la famille ou des proches de personnes soupçonnées d’actes
criminels lorsqu’elle ne pouvait pas localiser l’intéressé, sans les inculper ni posséder de
preuves que ces individus étaient impliqués dans les faits en cause. Des agents du service
de renseignements de l’État (Agence nationale de renseignements − ANR) arrêtent eux
aussi souvent des personnes accusées d’infractions de droit commun qui n’ont rien à voir
avec la sûreté de l’État. Enfin, des éléments des forces de sécurité, de l’ANR notamment,
ont aussi été impliqués dans des atteintes aux droits de l’homme motivées par des raisons
d’ordre politique et ciblant des opposants politiques, des journalistes et des défenseurs des
droits de l’homme.
6. Après leur arrestation, les personnes placées en détention se voient régulièrement
refuser les garanties que leur reconnaît le droit congolais. En particulier, elles ne sont
généralement pas enregistrées en bonne et due forme et par conséquent les dossiers sont
souvent incomplets ou ne sont pas mis à jour. Rares sont les détenus déférés devant un juge
dans les quarante-huit heures qui suivent leur arrestation comme le prévoit la Constitution,
d’où la multiplication d’«hébergés», c’est-à-dire de détenus qui n’ont pas été inculpés
officiellement. De plus, très rares sont les cas renvoyés devant le procureur public ou
militaire et de nombreux détenus sont libérés après avoir versé une amende dont il n’est pas
fait officiellement état dans le dossier.
Mesures prises par le Bureau conjoint
7. Le Bureau conjoint a pris des mesures contre les arrestations et détentions arbitraires
ou illégales pour essayer d’inciter le Gouvernement à assurer aux détenus la protection à
laquelle ils sont en droit de prétendre aux termes du droit congolais et du droit international
des droits de l’homme. Pendant la période considérée, du personnel du Bureau conjoint a
visité de nombreuses cellules de détention et prisons dans le pays, dans plusieurs cas
accompagné de procureurs nationaux, afin de vérifier la légalité des détentions, et a obtenu
la libération de dizaines de personnes qui avaient été placées illégalement en détention.
Après que le Bureau conjoint eut demandé aux autorités judiciaires et policières de notifier
à tous les détenus leurs droits et les chefs d’inculpation qui pesaient contre eux,
le Procureur général a exigé de tous les personnels qui procédaient à des placements en
détention qu’ils informent les intéressés des chefs d’inculpation retenus contre eux. Cela
dit, cette consigne est rarement suivie dans la pratique. De même, pendant la période
considérée, le Bureau conjoint a organisé plusieurs ateliers et activités de sensibilisation à
l’intention des forces de sécurité congolaises pour les inciter à mieux respecter les droits de
l’homme. Il faudrait rappeler que le Bureau conjoint et d’autres acteurs des droits de
l’homme n’ont toujours pas accès à un certain nombre de lieux de détention, dont le camp
militaire de Tshatshi, l’état-major du renseignement militaire à Kinshasa et la plupart des
centres de détention de l’ANR du pays, en dépit des instructions données en juillet 2005
aux autorités compétentes par le Président de la République démocratique du Congo.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
8. Les arrestations et détentions arbitraires et illégales répondent souvent à des
préoccupations d’ordre lucratif. La plupart du temps, ces affaires ne parviennent pas
jusqu’à l’appareil judiciaire et aboutissent à un marchandage, se soldant par un arrangement
avec l’agent qui a procédé à l’arrestation et qui contraint la victime ou sa famille à lui
verser un pot-de-vin en échange de sa liberté. Par crainte de représailles ou d’une nouvelle arrestation, peu de personnes portent ensuite plainte après avoir été libérées. D’autres détentions illégales sont motivées par des raisons d’ordre politique. Ces deux types de problèmes sont exacerbés par le dysfonctionnement du système de justice pénale.
B. Conditions carcérales, torture et mauvais traitements en détention
Recommandations existantes
9. Il faudrait prendre immédiatement des mesures pour réduire la surpopulation carcérale, remédier aux conditions de détention inhumaines et améliorer la sécurité dans tous les établissements. Par ailleurs, il faudrait adopter des mesures législatives pour appliquer la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il faudrait prendre des mesures efficaces pour prévenir tout acte de torture ou de maltraitance. Des enquêtes rapides, impartiales et approfondies sur les actes de torture et les mauvais traitements signalés devraient être entreprises et les auteurs de tels actes condamnés en bonne et due forme et obligés d’indemniser leurs victimes. De plus, le Gouvernement devrait prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que toutes les personnes qui signalent des actes de torture ou des mauvais traitements soient protégées contre les menaces ou les actes d’intimidation.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
10. Pendant la période considérée, le Gouvernement n’a guère fait de progrès dans l’élaboration d’une politique de nature à rendre les prisons plus autosuffisantes. Le nouveau Plan stratégique de réforme des prisons mis au point par le Ministère de la justice avec le soutien de la Division de l’état de droit de la MONUC est à l’examen. La majorité des prisons se caractérisent par leur délabrement, l’état d’inanition des détenus et l’incidence des maladies. Cet état de choses revient à infliger un traitement cruel, inhumain ou dégradant aux détenus et ne répond pas aux normes internationales élémentaires qui veulent que toute personne privée de liberté soit traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine8. Des conditions de détention désastreuses entraînent un taux de mortalité extrêmement élevé dans la population carcérale. Quarante quatre personnes seraient décédées en détention au Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK) entre janvier et août 2009, essentiellement faute de nourriture et de médicaments.
11. La surpopulation, qui s’explique surtout par un recours abusif à la détention provisoire, demeure un problème majeur dans les prisons du pays. Les condamnés et les prévenus, les adultes et les mineurs sont souvent détenus dans les mêmes quartiers. Les autorités ont cependant pris quelques mesures pour réduire la surpopulation. Ainsi, au CPRK, elles ont libéré, pour bonne conduite, des détenus qui avaient exécuté au moins un quart de leur peine. Il reste que l’on peut être préoccupé par le fait que des auteurs de viol,
de violences sexuelles et d’autres atteintes aux droits de l’homme ont eux aussi bénéficié de cette mesure. Vu les protestations suscitées par l’élargissement d’auteurs de violences sexuelles, le Ministre de la justice a annoncé, en octobre 2009, qu’un projet de loi dont le but était d’exclure les auteurs de sévices sexuels du bénéfice d’une libération conditionnelle était en cours de rédaction.
12. En raison de l’insécurité, d’une infrastructure délabrée, de la corruption et de la lenteur des procédures judiciaires, des prévenus et des condamnés, dont des criminels très connus, s’évadent régulièrement de prison. Entre mars et novembre 2009, 135 détenus se sont enfuis de la prison de Mahagi, dans le district d’Ituri, dans la province orientale. La fréquence des évasions des prisons congolaises mine sérieusement la lutte contre l’impunité. Dans certains cas, des mesures sont prises contre l’encadrement accusé de les
avoir facilitées: le directeur de la prison de Mahagi a été arrêté le 3 juillet 2009 et le commissaire de police adjoint du poste de police de Gwoknyeri (à 27 kilomètres de Mahagi) a été arrêté le 10 juin 2009.
13. Le Parlement n’a toujours pas adopté de loi érigeant la torture en infraction et les
personnes placées en détention provisoire sont encore souvent soumises à la torture et à d’autres formes de traitements cruels, inhumains et dégradants par la PNC, l’ANL et les FARDC. Les mauvais traitements se produisent à différents stades de la détention − au moment de l’arrestation, pendant l’interrogatoire et pendant la détention provisoire − et entraînent souvent la mort ou des lésions graves. Le 16 juin 2009 par exemple, un détenu est décédé dans une prison du groupement de Bena Mpiana, sur le territoire de Ngandajika, dans le Kasaï oriental, après avoir été arrêté et frappé par des agents de la PNC parce qu’il portait «illégalement» des chaussures de «policier». Pendant la période considérée, quelques rares enquêtes et procès ont eu lieu suite à des actes de torture et des mauvais traitements signalés. Le Gouvernement n’a rien fait pour veiller à ce que les personnes qui dénonçaient des actes de torture et des mauvais traitements soient toutes protégées contre les menaces et les actes d’intimidation.
Mesures prises par le Bureau conjoint
14. Pendant la période considérée, du personnel du Bureau conjoint a continué de visiter fréquemment des prisons aux quatre coins du pays, y compris en compagnie du Ministre des droits de l’homme de certaines provinces, et a réuni des informations sur les cellules délabrées, l’absence de nourriture et de soins médicaux, la corruption et le manque de qualifications du personnel pénitentiaire. S’agissant de l’insécurité alimentaire, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) intervient lorsque 30 % de la population d’un centre de détention souffre de malnutrition. Il fournit suffisamment de nourriture pour surmonter le problème dans huit centres, d’où une baisse des décès par malnutrition en détention. Cela dit, le Bureau conjoint craint que l’assistance du CICR n’ait incité le Gouvernement qui faisait déjà très peu à en faire encore moins. Le Bureau conjoint a poursuivi ses activités de sensibilisation et a continué de promouvoir l’adoption d’une loi criminalisant la torture. À l’occasion de la célébration de la Journée internationale des
Nations Unies pour le soutien aux victimes de la torture le 26 juin 2009, il a organisé un certain nombre d’activités. De plus, en partenariat avec Avocats sans frontières (AsF), il facilite la mise en oeuvre de décisions prises par le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture. En octobre 2009, en coopération avec le Ministère de la justice et les autorités judiciaires, il a organisé un atelier sur l’appareil judiciaire et le problème de la torture et de la mort en prison. À cet atelier, les participants ont demandé au Procureur général de la République près la Cour suprême de rédiger une directive à l’intention des procureurs sur la nécessité d’enquêter effectivement sur les cas de torture et de décès en prison. Cette directive est actuellement en cours de rédaction avec l’assistance du Bureau conjoint. Celui-ci continue activement de plaider pour une autosuffisance accrue des prisons.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
15. Dans sa majeure partie, le personnel pénitentiaire ne fait pas l’objet de recrutement systématique, ne suit pas de formation et n’est pas rémunéré. Qui plus est, le Gouvernement ne prévoit pas un financement suffisant pour les prisons et centres de détention. Il semble peu disposé à remédier à la situation des prisons et à engager les réformes nécessaires, de crainte de bouleverser les circuits de corruption qui se sont mis en place autour de la «privatisation» de la fonction pénitentiaire. La création d’exploitations agricoles pénitentiaires destinées à garantir l’approvisionnement alimentaire et la fourniture de médicaments de base pour prévenir les épidémies sont des mesures nécessaires, mais la «privatisation» de la fonction d’État a gêné ces quelques efforts. En ce qui concerne l’application de la Convention contre la torture, l’adoption des textes de loi nécessaires a connu des retards, dus principalement à l’actuel arriéré législatif. Le fait que les autorités n’engagent pas de poursuites contre les auteurs d’actes de torture est un exemple de plus de l’impunité chronique qui continue de sévir dans le pays. Des années de gouvernance au mieux indifférente et au pire menaçante font que les victimes congolaises de violations des droits de l’homme commises par des agents de l’État ont culturellement la conviction qu’il serait vain de se plaindre parce qu’elles auraient à faire face soit à de l’inaction, soit à des représailles.
C. Violences sexuelles et impunité
Recommandations existantes
16. Il faudrait abolir toutes les dispositions du droit congolais de caractère discriminatoire à l’égard des femmes. La réforme globale du Code de la famille et l’adoption de la loi relative à l’égalité entre les sexes, mettant en oeuvre l’article 14 de la Constitution, devraient constituer deux mesures législatives phares. Pour ce qui est des violences sexuelles, les institutions publiques devraient dénoncer publiquement et sans ambiguïté toutes les formes de violence à l’égard des femmes, y compris les violences conjugales, le viol conjugal et le harcèlement sexuel. Ces dénonciations ne devraient pas être tempérées par des allusions à la coutume, à la tradition ou à des considérations d’ordre religieux pour justifier ou excuser ce type de violence. Le Gouvernement devrait veiller à ce que les personnels des forces de sécurité de l’État connaissent et respectent la loi relative aux violences sexuelles et à ce que le système judiciaire permette de traduire les auteurs de violations en justice sans retard ni partialité. De plus, il devrait mettre en place et promouvoir un mécanisme efficace chargé de recevoir les plaintes pour violence sexuelle, y compris au sein du système pénitentiaire, d’enquêter sur ces plaintes et de fournir aux victimes des soins psychologiques et médicaux. Enfin, il devrait verser des dommages et intérêts à toutes les victimes de violences sexuelles commises par des agents de l’État et ouvrir un fonds à cet effet dans le budget national.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
17. Le nombre de cas de violences sexuelles enregistrés par le Bureau conjoint est
demeuré extrêmement élevé pendant la période à l’examen. Ces cas ne sont pas limités aux
zones de conflit armé mais se produisent partout dans le pays. Faute de sécurité et par
manque de séparation entre les détenus, les femmes placées en détention courent des
risques particuliers de violences sexuelles. À titre d’exemple, dans la nuit du 20 au 21 juin
2009, alors qu’il se produisait une tentative d’évasion à la prison de Goma, 23 femmes ont
été violées par des codétenus. La plupart des viols sont certes commis par des éléments de
groupes armés et des FARDC et de la PNC, mais le Bureau conjoint a recueilli des
informations sur un nombre impressionnant et croissant de faits commis par des civils.
18. Des initiatives prometteuses prises par le Gouvernement contre les violences
sexuelles, comme les lois relatives aux violences sexuelles adoptées le 20 juillet 2006, qui
ont considérablement amélioré le Code pénal et le Code de procédure pénale congolais,
n’ont pas produit les changements escomptés. Si les auteurs de viol sont jugés et reconnus
coupables, ils sont rarement condamnés à des peines allant jusqu’à cinq ans de prison et
l’État a rarement versé des dommages et intérêts aux victimes quand bien même ordre lui
est régulièrement donné de le faire. En juin 2009, le tribunal de grande instance de Mbuji
Mayi a statué dans 11 affaires de viol, mais a rendu une seule peine de prison supérieure à
cinq ans. Les autres peines allaient de trois à vingt-quatre mois. Même si les victimes se
voient accorder des dommages et intérêts pour des exactions commises par des agents de
l’État, le Gouvernement ne s’acquitte pas de la somme qu’il est tenu de verser à titre de
dommages et intérêts.
19. Le 25 novembre 2009, le Gouvernement a fait un pas en avant en lançant sa stratégie
nationale de lutte contre les violences sexuelles qui sera mise en application avec le soutien
du système des Nations Unies dans le pays. Il a mis au point une stratégie qui vise à
prévenir, corriger et atténuer les effets des violences sexuelles dans les zones de conflit et
reprend la stratégie globale de lutte contre les violences sexuelles en République
démocratique du Congo. Le Ministère du genre, de la famille et de l’enfant élabore aussi
actuellement des textes tendant à réformer le Code de la famille et à mettre en oeuvre la
disposition constitutionnelle relative à l’égalité des sexes.
20. Le 5 juillet 2009, le Président a déclaré une politique de tolérance zéro à l’égard des
auteurs de violations des droits de l’homme, des violeurs en particulier, au sein des forces
de sécurité congolaises. Le 31 juillet 2009, par exemple, la cour militaire du Kasaï oriental
a confirmé en appel la condamnation d’un inspecteur du bureau du procureur militaire de
Lodja, du district de Sankuru, dans le Kasaï oriental, pour le viol d’une mineure en
décembre 2007. L’intéressé à été condamné à vingt ans de servitude pénale et à une amende
de 100 000 francs congolais. Malgré quelques résultats positifs enregistrés en ce qui
concerne le procès et la condamnation de simples soldats et d’agents de police subalternes,
la plupart du temps, les crimes sexuels demeurent impunis. Les autorités congolaises n’ont
guère progressé dans l’arrestation et la poursuite des éléments des FARDC, en particulier
des officiers supérieurs, sur lesquels pèsent des soupçons. Au moment de la visite du
Conseil de sécurité en République démocratique du Congo en mai 2009, une liste de cinq officiers supérieurs accusés de viol a été remise aux autorités, dont le Président de la République démocratique du Congo. Malgré cette sensibilisation au plus haut niveau de l’État, peu de progrès ont été réalisés au cours des six mois qui ont suivi. Bien que deux de ces cinq officiers aient été placés en détention, aucun chef d’inculpation n’a été porté contre eux.
21. Des membres de groupes armés non intégrés continuent aussi de violer. Le 3 juin
2009, 5 miliciens Maï Maï qui avaient violé 135 femmes en juillet 2007 à Lieke Lesole, sur
le territoire d’Opala, dans la province orientale, ont été reconnus coupables de crimes
contre l’humanité, y compris de viol avec violence, et condamnés par le tribunal militaire
de Kisangani à des peines allant de trente ans de prison à la servitude pénale à perpétuité.
Les miliciens ont été aussi condamnés in solidum avec l’État à verser 2 500 dollars des
États-Unis de dommages et intérêts à chacune des victimes de coups et blessures et 10 000 dollars de dommages et intérêts à chacune des victimes de viol. Le jugement de Lieke Lesole marque un jalon dans l’histoire des réparations accordées à des victimes, mais malheureusement aucune somme n’a encore été versée.
Mesures prises par le Bureau conjoint
22. Le Bureau conjoint a poursuivi ses activités de renforcement des capacités et d’autonomisation dans la lutte contre les violences sexuelles. Dans le cadre du plan national contre les violences sexuelles, il est chargé de coordonner cette composante de la lutte contre l’impunité. Le programme du Bureau conjoint vise à saper l’impunité dont bénéficient les auteurs de violences sexuelles en apportant une assistance juridique aux victimes au moyen de permanences d’aide juridictionnelle mises en place dans plusieurs
provinces. Pour compléter ce programme, le Bureau conjoint fournit un soutien en termes d’allocations de mission aux procureurs militaires pour faciliter les enquêtes; il assure le transport jusqu’aux tribunaux du personnel judiciaire, des victimes et de leurs conseillers, il réunit des informations et intervient pour améliorer la situation. Il a aussi organisé des sessions de formation avec des acteurs étatiques et non étatiques. Par ailleurs, il a suivi de près et signalé des cas de violences sexuelles et fait le nécessaire pour que les responsables, en particulier les éléments des forces de sécurité, soient poursuivis, et a offert son aide au procureur militaire aux fins de l’enquête qu’il a fallu engager pour traduire en justice des officiers supérieurs. Dernièrement, il a mis au point un programme national d’accès à la justice pour les victimes de violences sexuelles avec le concours de plusieurs bailleurs de fonds. Une initiative pilote de défense des droits des victimes de violences sexuelles, y compris moyennant l’évaluation des mécanismes existants de recours et de réparation à la disposition des victimes, est aussi en cours d’élaboration.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
23. L’impunité des auteurs de crimes de violences sexuelles est chronique. Les personnes haut placées sont rarement poursuivies et, même si elles le sont, le secteur de la
justice manque si cruellement de crédits et de personnel que les procédures judiciaires sont
nécessairement lentes. Il arrive souvent que des personnalités − et en fait tout accusé qui en
a les moyens − monnaient leur sortie de prison. Qui plus est, des auteurs de violations
présumées «s’évadent» régulièrement de prison. D’autres facteurs font obstacle à
l’amélioration du sort des victimes, comme l’influence de coutumes locales et la crainte de
la victime d’être rejetée par sa famille et sa communauté. L’État ne s’attaque pas
véritablement aux racines sexospécifiques des violences sexuelles, à savoir l’infériorité
sociale, économique et politique des femmes dans la société congolaise. Les victimes
rencontrent aussi d’énormes difficultés pour accéder à la justice à cause des frais de justice
élevés, des règlements à l’amiable, des pressions et des menaces qui s’exercent sur elles et
de l’ignorance de la loi parmi les policiers des zones rurales. Tous ces facteurs contribuent
au climat d’impunité dont bénéficient les crimes commis à l’encontre des femmes.
D. Violation des droits économiques et sociaux et exploitation illégale
des ressources naturelles
Recommandations existantes
24. Dans le domaine des droits économiques et sociaux, il faudrait prendre des mesures
globales suffisantes pour remédier à l’exploitation illicite des ressources naturelles dans le
pays. Le Gouvernement devrait accroître la transparence de la collecte des ressources de
l’État, en particulier en procédant à la cartographie des recettes provenant d’acteurs qui
exploitent des zones riches en minerais, dans la ligne de l’Initiative de transparence des
industries extractives, et en distribuant les recettes conformément au devoir qui est le sien
de tirer le meilleur usage de ses ressources en vue de la réalisation progressive des droits de l’homme. Le Gouvernement est effectivement tenu d’utiliser ses recettes pour garantir le
libre accès de tous les enfants à l’enseignement primaire, assurer l’accès à des soins de santé de base à un coût abordable et veiller à ce que les centres de santé et les hôpitaux disposent de ressources humaines, médicales et financières. À sa quarante-troisième session, en novembre 2009, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le rapport de la République démocratique du Congo et rappelé entre autres la nécessité pour l’État partie de promouvoir la bonne gouvernance et de combattre la corruption ainsi que de prendre toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que ses ressources naturelles ne soient pas soumises à l’exploitation illégale et à la mauvaise gestion.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
25. Les autorités centrales et locales n’assurent pas l’exercice des droits économiques et sociaux et les efforts consentis jusqu’ici pour améliorer la situation ne répondent pas aux besoins. Le fait que le Gouvernement ne recueille ni ne distribue suffisamment de ressources continue de causer des violations des droits de l’homme d’ordre structurel et est source de corruption à travers le pays, dans la mesure où des fonctionnaires qui ne sont pas payés ou sont sous-payés extorquent de l’argent à la population dans l’exercice de leurs fonctions. Bien que le Gouvernement affirme respecter l’Initiative de transparence des industries extractives, dans la pratique la transparence n’est qu’illusion. Les sociétés privées comme les établissements publics révèlent rarement les profits réalisés et les autorités ne tiennent pas les acteurs étatiques ou non étatiques responsables du rôle qui est le leur dans l’exploitation illégale des ressources naturelles. Ce secteur déréglementé est aussi le premier à recruter et exploiter la main-d’oeuvre du pays. Les employés des services sociaux censés protéger le droit du travail, comme les inspecteurs du travail, sacrifient souvent les droits des travailleurs au profit de leur propre intérêt, empochant l’argent qui leur permettra de survivre. Par ailleurs, des sociétés privées ont procédé à des licenciements massifs au mépris total des règles et procédures en vigueur.
26. La République démocratique du Congo est souvent citée en tant qu’exemple du
«paradoxe des richesses». Alors que le pays regorge de ressources naturelles (il recèle par
exemple 80 % des ressources mondiales de coltan et 10 % de celles de cuivre), la
population vit dans une extrême pauvreté (80 % de la population congolaise vit avec moins
de 0,20 dollar des États-Unis par jour)11. Dans les provinces d’où sont extraites des
ressources minières, on a continué de signaler des problèmes de sécurité et des violations
des droits de l’homme en rapport avec l’extraction des ressources. Des affrontements entre
groupes rebelles et forces gouvernementales pour gagner le contrôle de sites miniers sont fréquents. En août 2009, les FDLR et les Maï Maï Shikito ont attaqué une mine placée sous la protection des forces gouvernementales à Omata, sur le territoire de Walikale, dans le Nord-Kivu, entraînant des pillages et faisant plusieurs morts et blessés parmi la population civile. De plus, les forces de sécurité gouvernementales et les forces armées irrégulières continuent de commettre des actes de violence sexuelle et de soumettre des mineurs artisanaux et d’autres civils qui vivent dans la région au travail forcé, à des impôts illégaux et à des extorsions de fonds.
27. S’agissant du droit à l’éducation, bien que l’article 43 de la Constitution prévoie un enseignement primaire public gratuit et obligatoire, les parents sont censés apporter leur cotisation au salaire des enseignants faute d’un financement suffisant de la part de l’État. L’accès à la nourriture et aux soins de santé est aussi loin de répondre aux normes minimales. Le système public de soins de santé est à peine fonctionnel et le Gouvernement est dans l’incapacité de réagir à des maladies qui accablent la population et qu’il serait pourtant possible de traiter. Comme le système des soins de santé perçoit une redevance de la part des usagers, la population la plus démunie n’y a pas accès. De ce fait, le pays enregistre des taux de mortalité maternelle et infantile parmi les plus élevés du monde.
Dans l’est du pays, le pillage systématique des centres de santé et l’obstruction arbitraire des convois humanitaires censés réapprovisionner des établissements en fournitures médicales ont aggravé la situation; par ailleurs, il est indispensable d’accroître les capacités médicales parce que de nombreux travailleurs médicaux congolais ont été contraints de fuir. Des taux de malnutrition élevés parmi les femmes, les enfants et les personnes déplacées ont rendu ces groupes de population plus vulnérables encore aux maladies infectieuses. Le sort des personnes déplacées est particulièrement préoccupant à cause de l’ampleur du problème. Ces personnes, qui ont perdu leur toit, vivent dans la misère absolue sans accès à une nourriture suffisante, ni eau potable, ni soins de santé, ni éducation pour leurs enfants.
Mesures prises par le Bureau conjoint
28. Le Bureau conjoint insiste de plus en plus sur le rapport entre l’exploitation illégale des ressources naturelles et la faible part de recettes publiques attribuée à la réalisation des droits économiques et sociaux. Il plaide pour que le Gouvernement redouble d’efforts en vue d’assurer l’exercice par tous les Congolais de leurs droits économiques et sociaux. En outre, il effectue des missions d’enquête afin de mieux comprendre les obstacles à la réglementation et à la politique relatives à l’exploitation des ressources naturelles. Il suit et évalue les progrès accomplis dans le domaine des droits économiques et sociaux. Il s’emploie à faire mieux connaître des parties prenantes l’article 2 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui pourrait servir à lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles dans le but de réaliser progressivement tous les droits de l’homme.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
29. De nombreux ministères dotés de responsabilités en matière de supervision et de collecte des recettes provenant du secteur des ressources naturelles manquent de personnel, de crédits et de capacités techniques pour s’acquitter de leurs fonctions, ce qui est source de corruption. Le Gouvernement perçoit bien moins en impôts et redevances qu’il le devrait de la part du secteur minier à cause de la corruption pratiquée à tous les niveaux. Or l’impunité est de mise pour quiconque s’adonne à la corruption parce que, la plupart du temps, elle se pratique avec l’aval ou sous les ordres du supérieur hiérarchique. Ces fonctionnaires interviennent dans l’appareil judiciaire pour bloquer les enquêtes et les poursuites dans les affaires d’exploitation illégale, de corruption et autres crimes en lien avec le secteur des ressources naturelles.
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Rapport de la Haut-Commissaire des Nations Unies :: Commentaires
Re: Rapport de la Haut-Commissaire des Nations Unies
E. Situation des journalistes, défenseurs des droits de l’homme, victimes et
témoins
Recommandations existantes
30. Les organes de l’État devraient encourager le dialogue et le contrôle publics pour
soutenir et faire progresser le processus démocratique. L’État devrait respecter ses obligations internationales en matière de liberté d’expression et de liberté de la presse et faire le nécessaire pour protéger les victimes, les témoins, les défenseurs des droits de l’homme et les membres de la presse qui sont de plus en plus menacés d’arrestation, voire de mort. Lors de sa visite en mai 2009, la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme a rappelé ces recommandations et en a formulé de nouvelles, tendant notamment à l’adoption de lois nationales et provinciales pour protéger
les défenseurs des droits de l’homme. Le Gouvernement devrait aussi respecter le régime de notification qui régit le droit de réunion pacifique. Enfin, il devrait accorder la personnalité morale aux organisations non gouvernementales qui remplissent les conditions administratives requises
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
31. Il n’existe toujours pas de loi protégeant les défenseurs des droits de l’homme, les
journalistes, les victimes et les témoins. De plus, le degré d’importance attaché par les
autorités congolaises à la nécessité de protéger ces personnes demeure insignifiant et
subjectif. Le problème tient en partie au fait que les autorités ne saisissent pas toutes le rôle
crucial joué par les défenseurs des droits de l’homme dans un régime démocratique. À
l’issue de sa visite en République démocratique du Congo en mai 2009, la Rapporteuse
spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme a souligné le fait que
l’absence de cadre légal contribuait à la situation précaire des défenseurs des droits de
l’homme dans le pays. Il n’a pas été fait de progrès sensible depuis.
32. Pendant la période considérée, les forces nationales de sécurité, les groupes armés et
les pouvoirs publics s’en sont pris tout particulièrement aux journalistes et aux défenseurs
des droits de l’homme dont l’exercice des droits à la liberté d’opinion et d’expression a été
soumis à des restrictions illégales. Le 26 juillet 2009, le Gouvernement a coupé
temporairement les relais de Radio France Internationale (RFI) sous prétexte qu’elle
déstabilisait le pays en émettant des informations «mensongères et non vérifiées». Fin
juillet 2009, le Ministre de la communication et des médias a qualifié de «terroristes
humanitaires» trois ONG internationales des droits de l’homme, à savoir Human Rights
Watch, Global Witness et la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme
(FIDH), les accusant d’être animées du désir de démoraliser le pays après qu’elles eurent
publié des rapports critiques sur la situation des droits de l’homme. Le 22 août 2009, un
journaliste à Star, station de radio locale privée propriété d’un membre de l’opposition
siégeant au Parlement, a été poignardé dans la région de Kasali, dans la commune de
Kadutu, ville de Bukavu, dans le Sud-Kivu. Il s’agissait du troisième journaliste tué à
Bukavu depuis 2007, ce qui a eu un effet préjudiciable sur les autres journalistes, même s’il
apparaît que les trois journalistes auraient été en fait victimes de criminels de droit
commun.
33. Un cas emblématique du peu d’espace réservé au débat démocratique et de
l’hostilité affichée par le Gouvernement pour la liberté d’expression est celui de
l’arrestation de Golden Misabiko, Président de l’ONG ASADHO/Katanga, le 24 juillet
2009, suite à la publication d’un rapport sur l’exploitation illégale d’uranium dans la mine
de Shinkolobwe. Le 21 septembre 2009, le tribunal de paix de Lubumbashi-Kamalondo a
condamné Golden Misabiko à douze mois de servitude pénale, dont huit avec sursis.
L’intéressé a été jugé coupable, au titre de l’article 199 du Code pénal, d’avoir excité la
population contre les pouvoirs établis. Aucun élément de preuve n’a été produit à
l’audience à l’appui de ce chef d’inculpation et pourtant la culpabilité de M. Misabiko a été
reconnue. Le 1er octobre 2009, le Président des Amis de Nelson Mandela pour la défense
des droits humains (AMDH), qui était en détention pour avoir dénoncé ce qu’il considérait
comme des conditions de travail esclavagistes dans une société du Bas-Congo, a été
provisoirement libéré après près de deux mois de détention. Ces affaires illustrent
l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire en vue d’intimider quiconque est perçu comme
un opposant au Gouvernement.
34. Les militants et les journalistes sont en butte jour après jour à des arrestations
arbitraires, des actes d’intimidation, des mauvais traitements et des menaces de mort. Dans
la nuit du 27 au 28 juillet 2009, dans la ville de Kanshi, à Mbuji Mayi, un groupe de cinq
individus armés, portant des uniformes des FARDC, auraient pénétré dans les locaux d’une
ONG locale, le Centre d’étude et de formation populaire pour les droits de l’homme
(CEFOP/DH), et ordonné au garde de leur donner l’adresse du directeur de l’organisation.
Celui-ci a refusé de coopérer et aurait été torturé. Le 18 août 2009, trois militants des droits
de l’homme ont été arrêtés à Mpemba, dans le Katanga. Ils auraient été soumis à des
mauvais traitements par deux agents de l’ANR et un officier de la PNC. Le même type de
répression s’abat sur les victimes et les témoins.
Mesures prises par le Bureau conjoint
35. Comme les autorités congolaises ont été lentes à agir pour accroître la protection des
défenseurs des droits de l’homme, d’autres parties prenantes ont pris des mesures à la fois
en réaction à telle ou telle situation et en amont du problème. Le Bureau conjoint prête une
attention particulière aux allégations de violations des droits de l’homme contre les
militants, les journalistes, les victimes et les témoins qui sont souvent la cible de la
répression des pouvoirs publics parce qu’ils prennent la parole contre la politique
gouvernementale ou les réalités difficiles du pays. Non seulement le Bureau conjoint
intervient en pareil cas, mais il prend aussi des mesures à titre préventif. Grâce à un projet
financé par la Commission européenne, il a créé un réseau national d’ONG de défense des
droits de l’homme spécialisées dans la protection, auxquelles il a fourni des moyens pour
renforcer leurs capacités dans neuf provinces. De plus, des ONG ont mis sur pied des
réseaux de protection à l’échelle des provinces. En coopération avec le Bureau conjoint, ces
réseaux ont adopté de nombreuses mesures de protection en faveur de personnes qui étaient
menacées, en les relogeant et en leur apportant une assistance médicale, psychosociale,
socioéconomique et juridique au moyen d’un fonds de protection alimenté par la Suisse, la
Suède et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
36. De hauts fonctionnaires entretiennent un climat d’intimidation et s’emploient à faire
taire l’opposition au lieu d’encourager le dialogue public et le contrôle de la gouvernance.
Les autorités policières, militaires, judiciaires et surtout politiques n’apprécient pas toujours
la nature et la légitimité du travail réalisé par les défenseurs des droits de l’homme et les
journalistes. Elles prétendent ne pas posséder les moyens d’exécuter leurs propres fonctions
de protection. Qui plus est, les victimes et les témoins éprouvent souvent une certaine
réticence à témoigner, de crainte de représailles s’ils dénoncent ce qu’ils ont subi ou portent
plainte comme ils en ont le droit.
F. Administration de la justice et impunité
Recommandations existantes
37. Les recommandations existantes dans le domaine de l’administration de la justice et
la lutte contre l’impunité appellent un renforcement du système judiciaire et du maintien de
l’ordre. Le Parlement congolais devrait adapter la législation en vigueur aux normes
internationales et donner la priorité à l’adoption de lois fondamentales tendant à réformer le
système judiciaire. Il devrait adopter une législation portant création d’une cour
constitutionnelle et d’une commission nationale indépendante des droits de l’homme qui
inspire la confiance. Il devrait aussi adopter la loi d’application du Statut de Rome de la
Cour pénale internationale. En outre, les organes de l’État congolais devraient permettre à
l’appareil judiciaire de remplir son rôle constitutionnel en toute indépendance, en
améliorant les conditions de travail du personnel judiciaire et en renforçant le Conseil
supérieur de la magistrature. Enfin, le Gouvernement devrait faire le nécessaire pour veiller
à ce que les tribunaux militaires se cantonnent à juger uniquement des militaires, pour des
infractions militaires et en accord avec les dispositions internationales applicables en la
matière13.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
38. Au moment de l’établissement du présent rapport, le Parlement n’avait pas encore
adopté les lois indispensables à la réforme du système judiciaire, notamment les textes
portant création de la cour constitutionnelle, de la cour de cassation et du conseil d’État. La
commission nationale indépendante des droits de l’homme n’a pas vu le jour et, si le texte
d’application du Statut de Rome a bien été examiné à plusieurs occasions, il n’a pas encore
été voté. Une telle loi permettrait de mettre en application le Statut de Rome sur le territoire
de la République démocratique du Congo et contribuerait à poser des normes de justice
pénale cohérentes en matière de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de
génocide. De plus, si elle a été créée, l’Entité de liaison, qui réunit tous les organes
gouvernementaux compétents pour s’attaquer aux violations des droits de l’homme, n’est
pas encore fonctionnelle.
39. Le 15 juillet 2009, dans le cadre d’une campagne de lutte contre la corruption, le
Président a signé plusieurs ordonnances révoquant 86 magistrats, mettant 2 magistrats à la
retraite et nommant 605 nouveaux magistrats, à titre de mesure disciplinaire prise
conformément à l’article 2 de la loi portant organisation et fonctionnement du Conseil
supérieur de la magistrature. Ces ordonnances violent en fait cette loi parce qu’elles ont été
prises sans que les magistrats intéressés aient été entendus, en violation de leur statut et des
principes d’une procédure régulière. En outre, la «privatisation» de la fonction judiciaire
− les personnels usant de leur qualité pour extorquer de l’argent au lieu de remplir le
mandat qui leur a été confié par la Constitution − est endémique tout comme l’est
l’ingérence des autorités politiques et militaires dans l’administration de la justice. L’action
du 15 juillet n’a pas attaqué ces problèmes de front; elle donne plutôt à penser qu’il s’agit
de mesures arbitraires et suscite des accusations de clientélisme. Ainsi, trois magistrats au
moins qui faisaient l’objet de mesures disciplinaires ou de peines infligées au pénal ont été
promus, tandis qu’un certain nombre de leurs confrères ont été révoqués pour les mêmes
raisons. Les ordonnances ont aussi provoqué le dysfonctionnement de plusieurs tribunaux
dont les magistrats ont été révoqués et qui, dans certains cas, n’ont pas été remplacés
plusieurs mois plus tard.
40. Faute de ressources et de personnel, le pouvoir judiciaire n’est toujours pas en
mesure de remplir son rôle constitutionnel. Ainsi, en août 2009, le commandement de
l’opération Kimia II a remis plus d’une dizaine d’hommes des FARDC à l’auditeur
militaire supérieur du Sud-Kivu, mais les procureurs de la province ne disposaient pas de
personnel suffisant pour traiter de ces affaires. En Ituri également, dans la province
orientale, l’administration de la justice souffre de lenteur en raison de la pénurie de
magistrats. Dans le Bandundu, le tribunal militaire de garnison de Bandundu n’a pas tenu
d’audience pendant à peu près cinq mois parce que le seul juge de Bandundu n’est rentré de
vacances qu’en septembre 2009. La présence de plus en plus fréquente de tribunaux
itinérants est un bon moyen de répondre à ces problèmes d’ordre structurel. Mais ces
tribunaux sont très onéreux et absorbent des ressources dont d’autres composantes du
système judiciaire auraient cruellement besoin. Une autre solution consiste à étendre la
compétence des tribunaux de paix à toutes les affaires de violations des droits de l’homme.
Mesures prises par le Bureau conjoint
41. Pendant la période considérée, le Bureau conjoint a continué de soutenir le système
judiciaire pour qu’il fasse front avec davantage d’efficacité aux atteintes aux droits de
l’homme. Il a apporté son assistance technique à l’élaboration de différents textes de loi et à
l’achèvement de la réforme judiciaire par la mise en place de juridictions supérieures et du
Conseil supérieur de la magistrature. Il a aussi mené plusieurs cours de formation à
l’intention du personnel judiciaire et de membres de la société civile, notamment sur
l’indépendance du pouvoir judiciaire et sur la déontologie et le comportement professionnel
du magistrat. Il a aussi prêté son soutien technique au Conseil supérieur de la magistrature
pour la mise au point d’un code de déontologie destiné aux magistrats. Dans le souci de
renforcer la lutte contre l’impunité, il soutient la création d’un groupe de travail sur
l’impunité qui sera placé sous la houlette du Ministre de la justice pendant le processus de
réforme de la justice. Ce groupe fonctionnera en tant qu’unité technique du Comité mixte
pour la réforme de la justice, apportera des idées et facilitera les changements qui
s’imposent. Dans l’ensemble du pays, le Bureau conjoint collabore aussi quotidiennement
avec le personnel judiciaire. L’assistance qu’il apporte va du partage d’informations à la
facilitation des transports à des fins d’enquête en passant par la réhabilitation de bâtiments.
Dans le cadre de son soutien à la lutte contre l’impunité, il a aussi procédé à la cartographie
des violations les plus graves des droits de l’homme et du droit international commises sur
le territoire de la République démocratique du Congo entre mars 1993 et juin 2003. La
phase de déploiement a eu lieu entre octobre 2008 et mai 2009. Il s’agira du premier et seul
rapport détaillé des Nations Unies faisant le point sur les violations majeures des droits de
l’homme dans le pays pendant cette période, le but étant de contribuer à renverser la
tendance de cycles d’impunité sans fin.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
42. Le secteur de la justice continue de ne pas fonctionner correctement et de
nombreuses violations des droits de l’homme évoquées dans le présent rapport demeurent
sans solution et pourrissent la situation faute de réaction judiciaire appropriée. Plusieurs
gros problèmes expliquent le peu de progrès réalisés dans l’administration de la justice.
Celle-ci est sérieusement entravée par un manque de crédits: l’enveloppe qui lui est
consacrée est tombée à 0,24 % du budget national en 2009 (contre 0,6 % du budget de
2006). Les traitements extrêmement faibles et la précarité élevée de l’emploi rendent les
magistrats vulnérables aux pressions exercées par les autorités politiques ou militaires et
favorisent la corruption. Le fait que la majorité de la population n’a pas accès à la justice et
l’inexécution des décisions de justice comptent parmi les autres problèmes à régler. Le
manque de bureaux et de logements dissuade les magistrats de travailler en province.
G. Lutte contre l’impunité en ce qui concerne les violations commises par les forces de sécurité congolaises
Recommandations existantes
43. Le Gouvernement congolais devrait mettre résolument en application une politique
de tolérance zéro pour toutes les violations des droits de l’homme. Il faut à cet effet que les
autorités judiciaires mènent à bien des enquêtes approfondies et poursuivent tous les
éléments des forces de sécurité accusés d’avoir commis des violations graves des droits de
l’homme. De plus, les officiers supérieurs doivent imposer des règles de discipline sévères.
Le Gouvernement devrait aussi mettre en place un mécanisme de contrôle strict de sécurité
afin de tenir compte des antécédents des candidats à des fonctions officielles en termes de
respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et prêter
particulièrement attention aux postes clefs dans les forces armées, la police nationale et les
autres services de sécurité. De plus, pour répondre aux violations des droits de l’homme
commises par les FARDC dans le contexte d’opérations militaires dans le Nord et le Sud-
Kivu et la province orientale, il devrait prendre les mesures voulues pour révoquer les
officiers ou dissoudre les unités impliqués dans des violations graves des droits de l’homme
et les traduire en justice14. Le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires,
sommaires ou arbitraires a effectué une mission en République démocratique du Congo en
octobre 2009. Après sa visite, il a formulé six recommandations en vue de lutter contre
l’impunité dans le pays et souligné la nécessité de réformer le système pénitentiaire et de
destituer les officiers supérieurs de l’armée qui sont présumés avoir commis des crimes de
guerre, des crimes contre l’humanité ou d’autres infractions graves.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
44. Suite à des accords politiques successifs, les forces de sécurité de l’État ont intégré
dans leurs rangs des auteurs de violations graves des droits de l’homme qui, dans un certain
nombre de cas, ont continué de s’en prendre à la population civile et de violer les droits de
l’homme. Dans les régions de l’est du pays en particulier, plusieurs bataillons des FARDC
− notamment dans le cadre des opérations Kimia II − ont perpétré des attaques et violé les
droits de l’homme, accusant des civils de collaborer avec des groupes rebelles.
45. Les pouvoirs publics ont pris quelques mesures, modestes, pour mettre en oeuvre la
politique de tolérance zéro du Gouvernement à l’égard des éléments des FARDC impliqués
dans des violations des droits de l’homme. Des soldats ont été retirés du service actif et de
simples soldats ont été reconnus coupables de violations des droits de l’homme et
condamnés, mais peu de progrès ont été faits. En juillet 2009 par exemple, la cour militaire
opérationnelle du Nord-Kivu qui siégeait à Rutshuru a connu de neuf affaires différentes.
Le 27 juillet 2009, elle a condamné par contumace le colonel Kipanga à la servitude pénale
à perpétuité et le major Lusungu à dix ans de servitude pénale principale pour crimes contre
l’humanité. Le colonel Kipanga s’est évadé de prison et, malgré sa condamnation, a rejoint
ultérieurement les FARDC. La cour a aussi condamné les deux officiers à payer in solidum
avec l’État des dommages et intérêts aux victimes de viol. Le 11 septembre 2009, le
tribunal militaire de garnison de Bunia, dans la province orientale, a condamné un soldat
des FARDC du 132e bataillon à la servitude pénale à perpétuité pour viol et meurtre. Les
FARDC l’ont aussi exclu de leurs rangs.
46. Malgré des requêtes répétées du Conseil de sécurité, le Gouvernement n’a pris
aucune mesure concrète pour lancer un processus d’assainissement qui permettrait de
passer en revue les antécédents des agents actuels et futurs des forces de sécurité au regard
de leur respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme et de les retirer
du service actif si besoin est. Au contraire, des auteurs connus de violations des droits de
l’homme, dont certains sont cités dans plusieurs rapports publics des Nations Unies, ont été
intégrés dans les FARDC, la police ou les services de renseignements.
Mesures prises par le Bureau conjoint
47. Au cours de la période considérée, le Bureau conjoint a fourni des informations au
personnel judiciaire militaire congolais, au Ministère de la défense et à la hiérarchie de la
PNC et des FARDC sur les violations des droits de l’homme perpétrées par des agents de la
PNC et des FARDC sur le territoire de la République démocratique du Congo. Il a aussi
fourni un soutien logistique et de fond pour des missions d’enquêtes conjointes à des
personnels de la justice civile et militaire congolaise. Dans le souci de multiplier les
poursuites, la MONUC a décidé de soutenir des équipes d’enquête mixtes par des projets
d’impact rapide. Le Bureau conjoint joue aussi un rôle important au sein de la cellule
d’intervention et d’alerte rapides de la MONUC qui vise à identifier les commandants
d’unités militaires qui ont systématiquement violé les droits de l’homme depuis le
lancement de l’opération Kimia II dans l’est du pays et à leur demander des comptes. De
plus, plusieurs séminaires de formation et ateliers sur les droits de l’homme ont été
organisés à l’intention des FARDC et autres forces de sécurité.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
48. Le Gouvernement congolais fournit des ressources logistiques et financières
insuffisantes aux forces de sécurité de l’État. Les violations des droits de l’homme par les
FARDC s’expliquent par toutes sortes de causes d’ordre structurel. Les agents des forces de
sécurité ne sont pas suffisamment ni régulièrement payés et ne disposent pas de fournitures
suffisantes. Ils n’ont pas de casernes, ne suivent pas de formation et ne disposent pas
d’endroits où stocker leurs armes. Dans le Sud-Kivu, des soldats des FARDC qui
participaient à l’opération Kimia II ont organisé une série de manifestations en août 2009,
exigeant le versement de leur solde. Le 27 août 2009, à Lubarika (à 66 kilomètres au nord
d’Uvira, dans le Sud-Kivu), des soldats du 332e bataillon ont tiré en l’air pour demander
leur solde. Ils ont pillé des maisons et érigé des barrages routiers, frappant les personnes qui
refusaient de leur donner de l’argent ou qui n’en avaient pas les moyens. Il faut absolument
que le Gouvernement s’attaque aux causes profondes du problème en versant en temps
voulu la solde du personnel militaire. Il doit aussi apporter un soutien logistique pour
transporter le matériel militaire et fournir suffisamment de rations alimentaires pour que les
FARDC renoncent à leur pratique du travail forcé et cessent de piller les villages. L’armée
est très hétérogène et dans l’ensemble manque de discipline. Elle compte désormais 55
groupes rebelles et milices qui n’ont pas été contrôlés à des fins de sécurité et n’ont reçu
aucune formation. L’armée en est venue à violer les droits de l’homme parce qu’elle ne
s’est pas dotée des structures de commandement et de contrôle ni des mécanismes de
responsabilisation nécessaires pour prévenir les exactions qui pourraient être commises par
ses hommes.
III. Conclusion
49. Plusieurs obstacles à l’application des recommandations existantes ont été
repérés. Indissociables les uns des autres, ils empêchent l’amélioration de la situation
globale des droits de l’homme en République démocratique du Congo. La mauvaise
gouvernance, l’absence d’état de droit et de volonté politique expliquent un bilan
inquiétant en matière de droits de l’homme et continuent de gêner le développement
et l’élimination de la pauvreté. Les secteurs publics manquent tous de ressources et le
Gouvernement n’assure pas les droits économiques et sociaux élémentaires, tels les droits à des soins de santé et à l’éducation. Le dysfonctionnement et le manque de personnel de l’appareil judiciaire contribuent à un climat d’impunité pour les violations des droits de l’homme et portent atteinte à la sécurité des Congolais. De plus, le manque de crédits affectés à la fonction publique, à l’administration pénitentiaire et aux forces de sécurité en particulier alimente une corruption systémique et favorise la «privatisation» des fonctions de l’État. Il faudrait remédier effectivement à ces difficultés. Le Gouvernement doit arrêter tout un train de mesures cohérentes, systématiques et axées sur les droits de l’homme avec le concours de toutes
les parties prenantes locales, nationales et internationales compétentes pour donner suite aux recommandations qui ont déjà été formulées afin de protéger les droits de l’homme des citoyens.
IV. Recommandations adressées au Gouvernement de la République démocratique du Congo
50. La Haut-Commissaire prie instamment le Gouvernement de mettre pleinement
en oeuvre les recommandations que les mécanismes des droits de l’homme, dont les
sept titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, ainsi que d’autres titulaires
de mandat et organes conventionnels, lui ont d’ores et déjà adressées et dont le
présent rapport dresse le bilan.
V. Recommandations au Conseil des droits de l’homme
51. À la lumière des défis multiples qu’il appartient à la République démocratique
du Congo de relever dans le domaine des droits de l’homme et du peu de progrès
réalisés pour mettre en oeuvre les recommandations faites précédemment par
différentes composantes du système des droits de l’homme des Nations Unies, le
Conseil des droits de l’homme devrait, à sa prochaine session, fixer des objectifs
prioritaires dont la réalisation serait contrôlée à l’aune de critères mesurables établis
par rapport aux recommandations visant les sept domaines thématiques (chap. II,
sect. A à G) décrits dans le présent rapport afin d’évaluer les progrès accomplis par le
Gouvernement.
52. Le Conseil devrait rester saisi de la situation des droits de l’homme en
République démocratique du Congo et veiller à ce que la situation soit suivie
continuellement, y compris en demandant au Gouvernement d’adresser une invitation
permanente aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil et
de faciliter les missions des rapporteurs spéciaux compétents. La Haut-Commissaire
est elle aussi prête à continuer de faire rapport chaque année au Conseil sur la
situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo.
témoins
Recommandations existantes
30. Les organes de l’État devraient encourager le dialogue et le contrôle publics pour
soutenir et faire progresser le processus démocratique. L’État devrait respecter ses obligations internationales en matière de liberté d’expression et de liberté de la presse et faire le nécessaire pour protéger les victimes, les témoins, les défenseurs des droits de l’homme et les membres de la presse qui sont de plus en plus menacés d’arrestation, voire de mort. Lors de sa visite en mai 2009, la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme a rappelé ces recommandations et en a formulé de nouvelles, tendant notamment à l’adoption de lois nationales et provinciales pour protéger
les défenseurs des droits de l’homme. Le Gouvernement devrait aussi respecter le régime de notification qui régit le droit de réunion pacifique. Enfin, il devrait accorder la personnalité morale aux organisations non gouvernementales qui remplissent les conditions administratives requises
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
31. Il n’existe toujours pas de loi protégeant les défenseurs des droits de l’homme, les
journalistes, les victimes et les témoins. De plus, le degré d’importance attaché par les
autorités congolaises à la nécessité de protéger ces personnes demeure insignifiant et
subjectif. Le problème tient en partie au fait que les autorités ne saisissent pas toutes le rôle
crucial joué par les défenseurs des droits de l’homme dans un régime démocratique. À
l’issue de sa visite en République démocratique du Congo en mai 2009, la Rapporteuse
spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme a souligné le fait que
l’absence de cadre légal contribuait à la situation précaire des défenseurs des droits de
l’homme dans le pays. Il n’a pas été fait de progrès sensible depuis.
32. Pendant la période considérée, les forces nationales de sécurité, les groupes armés et
les pouvoirs publics s’en sont pris tout particulièrement aux journalistes et aux défenseurs
des droits de l’homme dont l’exercice des droits à la liberté d’opinion et d’expression a été
soumis à des restrictions illégales. Le 26 juillet 2009, le Gouvernement a coupé
temporairement les relais de Radio France Internationale (RFI) sous prétexte qu’elle
déstabilisait le pays en émettant des informations «mensongères et non vérifiées». Fin
juillet 2009, le Ministre de la communication et des médias a qualifié de «terroristes
humanitaires» trois ONG internationales des droits de l’homme, à savoir Human Rights
Watch, Global Witness et la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme
(FIDH), les accusant d’être animées du désir de démoraliser le pays après qu’elles eurent
publié des rapports critiques sur la situation des droits de l’homme. Le 22 août 2009, un
journaliste à Star, station de radio locale privée propriété d’un membre de l’opposition
siégeant au Parlement, a été poignardé dans la région de Kasali, dans la commune de
Kadutu, ville de Bukavu, dans le Sud-Kivu. Il s’agissait du troisième journaliste tué à
Bukavu depuis 2007, ce qui a eu un effet préjudiciable sur les autres journalistes, même s’il
apparaît que les trois journalistes auraient été en fait victimes de criminels de droit
commun.
33. Un cas emblématique du peu d’espace réservé au débat démocratique et de
l’hostilité affichée par le Gouvernement pour la liberté d’expression est celui de
l’arrestation de Golden Misabiko, Président de l’ONG ASADHO/Katanga, le 24 juillet
2009, suite à la publication d’un rapport sur l’exploitation illégale d’uranium dans la mine
de Shinkolobwe. Le 21 septembre 2009, le tribunal de paix de Lubumbashi-Kamalondo a
condamné Golden Misabiko à douze mois de servitude pénale, dont huit avec sursis.
L’intéressé a été jugé coupable, au titre de l’article 199 du Code pénal, d’avoir excité la
population contre les pouvoirs établis. Aucun élément de preuve n’a été produit à
l’audience à l’appui de ce chef d’inculpation et pourtant la culpabilité de M. Misabiko a été
reconnue. Le 1er octobre 2009, le Président des Amis de Nelson Mandela pour la défense
des droits humains (AMDH), qui était en détention pour avoir dénoncé ce qu’il considérait
comme des conditions de travail esclavagistes dans une société du Bas-Congo, a été
provisoirement libéré après près de deux mois de détention. Ces affaires illustrent
l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire en vue d’intimider quiconque est perçu comme
un opposant au Gouvernement.
34. Les militants et les journalistes sont en butte jour après jour à des arrestations
arbitraires, des actes d’intimidation, des mauvais traitements et des menaces de mort. Dans
la nuit du 27 au 28 juillet 2009, dans la ville de Kanshi, à Mbuji Mayi, un groupe de cinq
individus armés, portant des uniformes des FARDC, auraient pénétré dans les locaux d’une
ONG locale, le Centre d’étude et de formation populaire pour les droits de l’homme
(CEFOP/DH), et ordonné au garde de leur donner l’adresse du directeur de l’organisation.
Celui-ci a refusé de coopérer et aurait été torturé. Le 18 août 2009, trois militants des droits
de l’homme ont été arrêtés à Mpemba, dans le Katanga. Ils auraient été soumis à des
mauvais traitements par deux agents de l’ANR et un officier de la PNC. Le même type de
répression s’abat sur les victimes et les témoins.
Mesures prises par le Bureau conjoint
35. Comme les autorités congolaises ont été lentes à agir pour accroître la protection des
défenseurs des droits de l’homme, d’autres parties prenantes ont pris des mesures à la fois
en réaction à telle ou telle situation et en amont du problème. Le Bureau conjoint prête une
attention particulière aux allégations de violations des droits de l’homme contre les
militants, les journalistes, les victimes et les témoins qui sont souvent la cible de la
répression des pouvoirs publics parce qu’ils prennent la parole contre la politique
gouvernementale ou les réalités difficiles du pays. Non seulement le Bureau conjoint
intervient en pareil cas, mais il prend aussi des mesures à titre préventif. Grâce à un projet
financé par la Commission européenne, il a créé un réseau national d’ONG de défense des
droits de l’homme spécialisées dans la protection, auxquelles il a fourni des moyens pour
renforcer leurs capacités dans neuf provinces. De plus, des ONG ont mis sur pied des
réseaux de protection à l’échelle des provinces. En coopération avec le Bureau conjoint, ces
réseaux ont adopté de nombreuses mesures de protection en faveur de personnes qui étaient
menacées, en les relogeant et en leur apportant une assistance médicale, psychosociale,
socioéconomique et juridique au moyen d’un fonds de protection alimenté par la Suisse, la
Suède et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
36. De hauts fonctionnaires entretiennent un climat d’intimidation et s’emploient à faire
taire l’opposition au lieu d’encourager le dialogue public et le contrôle de la gouvernance.
Les autorités policières, militaires, judiciaires et surtout politiques n’apprécient pas toujours
la nature et la légitimité du travail réalisé par les défenseurs des droits de l’homme et les
journalistes. Elles prétendent ne pas posséder les moyens d’exécuter leurs propres fonctions
de protection. Qui plus est, les victimes et les témoins éprouvent souvent une certaine
réticence à témoigner, de crainte de représailles s’ils dénoncent ce qu’ils ont subi ou portent
plainte comme ils en ont le droit.
F. Administration de la justice et impunité
Recommandations existantes
37. Les recommandations existantes dans le domaine de l’administration de la justice et
la lutte contre l’impunité appellent un renforcement du système judiciaire et du maintien de
l’ordre. Le Parlement congolais devrait adapter la législation en vigueur aux normes
internationales et donner la priorité à l’adoption de lois fondamentales tendant à réformer le
système judiciaire. Il devrait adopter une législation portant création d’une cour
constitutionnelle et d’une commission nationale indépendante des droits de l’homme qui
inspire la confiance. Il devrait aussi adopter la loi d’application du Statut de Rome de la
Cour pénale internationale. En outre, les organes de l’État congolais devraient permettre à
l’appareil judiciaire de remplir son rôle constitutionnel en toute indépendance, en
améliorant les conditions de travail du personnel judiciaire et en renforçant le Conseil
supérieur de la magistrature. Enfin, le Gouvernement devrait faire le nécessaire pour veiller
à ce que les tribunaux militaires se cantonnent à juger uniquement des militaires, pour des
infractions militaires et en accord avec les dispositions internationales applicables en la
matière13.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
38. Au moment de l’établissement du présent rapport, le Parlement n’avait pas encore
adopté les lois indispensables à la réforme du système judiciaire, notamment les textes
portant création de la cour constitutionnelle, de la cour de cassation et du conseil d’État. La
commission nationale indépendante des droits de l’homme n’a pas vu le jour et, si le texte
d’application du Statut de Rome a bien été examiné à plusieurs occasions, il n’a pas encore
été voté. Une telle loi permettrait de mettre en application le Statut de Rome sur le territoire
de la République démocratique du Congo et contribuerait à poser des normes de justice
pénale cohérentes en matière de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de
génocide. De plus, si elle a été créée, l’Entité de liaison, qui réunit tous les organes
gouvernementaux compétents pour s’attaquer aux violations des droits de l’homme, n’est
pas encore fonctionnelle.
39. Le 15 juillet 2009, dans le cadre d’une campagne de lutte contre la corruption, le
Président a signé plusieurs ordonnances révoquant 86 magistrats, mettant 2 magistrats à la
retraite et nommant 605 nouveaux magistrats, à titre de mesure disciplinaire prise
conformément à l’article 2 de la loi portant organisation et fonctionnement du Conseil
supérieur de la magistrature. Ces ordonnances violent en fait cette loi parce qu’elles ont été
prises sans que les magistrats intéressés aient été entendus, en violation de leur statut et des
principes d’une procédure régulière. En outre, la «privatisation» de la fonction judiciaire
− les personnels usant de leur qualité pour extorquer de l’argent au lieu de remplir le
mandat qui leur a été confié par la Constitution − est endémique tout comme l’est
l’ingérence des autorités politiques et militaires dans l’administration de la justice. L’action
du 15 juillet n’a pas attaqué ces problèmes de front; elle donne plutôt à penser qu’il s’agit
de mesures arbitraires et suscite des accusations de clientélisme. Ainsi, trois magistrats au
moins qui faisaient l’objet de mesures disciplinaires ou de peines infligées au pénal ont été
promus, tandis qu’un certain nombre de leurs confrères ont été révoqués pour les mêmes
raisons. Les ordonnances ont aussi provoqué le dysfonctionnement de plusieurs tribunaux
dont les magistrats ont été révoqués et qui, dans certains cas, n’ont pas été remplacés
plusieurs mois plus tard.
40. Faute de ressources et de personnel, le pouvoir judiciaire n’est toujours pas en
mesure de remplir son rôle constitutionnel. Ainsi, en août 2009, le commandement de
l’opération Kimia II a remis plus d’une dizaine d’hommes des FARDC à l’auditeur
militaire supérieur du Sud-Kivu, mais les procureurs de la province ne disposaient pas de
personnel suffisant pour traiter de ces affaires. En Ituri également, dans la province
orientale, l’administration de la justice souffre de lenteur en raison de la pénurie de
magistrats. Dans le Bandundu, le tribunal militaire de garnison de Bandundu n’a pas tenu
d’audience pendant à peu près cinq mois parce que le seul juge de Bandundu n’est rentré de
vacances qu’en septembre 2009. La présence de plus en plus fréquente de tribunaux
itinérants est un bon moyen de répondre à ces problèmes d’ordre structurel. Mais ces
tribunaux sont très onéreux et absorbent des ressources dont d’autres composantes du
système judiciaire auraient cruellement besoin. Une autre solution consiste à étendre la
compétence des tribunaux de paix à toutes les affaires de violations des droits de l’homme.
Mesures prises par le Bureau conjoint
41. Pendant la période considérée, le Bureau conjoint a continué de soutenir le système
judiciaire pour qu’il fasse front avec davantage d’efficacité aux atteintes aux droits de
l’homme. Il a apporté son assistance technique à l’élaboration de différents textes de loi et à
l’achèvement de la réforme judiciaire par la mise en place de juridictions supérieures et du
Conseil supérieur de la magistrature. Il a aussi mené plusieurs cours de formation à
l’intention du personnel judiciaire et de membres de la société civile, notamment sur
l’indépendance du pouvoir judiciaire et sur la déontologie et le comportement professionnel
du magistrat. Il a aussi prêté son soutien technique au Conseil supérieur de la magistrature
pour la mise au point d’un code de déontologie destiné aux magistrats. Dans le souci de
renforcer la lutte contre l’impunité, il soutient la création d’un groupe de travail sur
l’impunité qui sera placé sous la houlette du Ministre de la justice pendant le processus de
réforme de la justice. Ce groupe fonctionnera en tant qu’unité technique du Comité mixte
pour la réforme de la justice, apportera des idées et facilitera les changements qui
s’imposent. Dans l’ensemble du pays, le Bureau conjoint collabore aussi quotidiennement
avec le personnel judiciaire. L’assistance qu’il apporte va du partage d’informations à la
facilitation des transports à des fins d’enquête en passant par la réhabilitation de bâtiments.
Dans le cadre de son soutien à la lutte contre l’impunité, il a aussi procédé à la cartographie
des violations les plus graves des droits de l’homme et du droit international commises sur
le territoire de la République démocratique du Congo entre mars 1993 et juin 2003. La
phase de déploiement a eu lieu entre octobre 2008 et mai 2009. Il s’agira du premier et seul
rapport détaillé des Nations Unies faisant le point sur les violations majeures des droits de
l’homme dans le pays pendant cette période, le but étant de contribuer à renverser la
tendance de cycles d’impunité sans fin.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
42. Le secteur de la justice continue de ne pas fonctionner correctement et de
nombreuses violations des droits de l’homme évoquées dans le présent rapport demeurent
sans solution et pourrissent la situation faute de réaction judiciaire appropriée. Plusieurs
gros problèmes expliquent le peu de progrès réalisés dans l’administration de la justice.
Celle-ci est sérieusement entravée par un manque de crédits: l’enveloppe qui lui est
consacrée est tombée à 0,24 % du budget national en 2009 (contre 0,6 % du budget de
2006). Les traitements extrêmement faibles et la précarité élevée de l’emploi rendent les
magistrats vulnérables aux pressions exercées par les autorités politiques ou militaires et
favorisent la corruption. Le fait que la majorité de la population n’a pas accès à la justice et
l’inexécution des décisions de justice comptent parmi les autres problèmes à régler. Le
manque de bureaux et de logements dissuade les magistrats de travailler en province.
G. Lutte contre l’impunité en ce qui concerne les violations commises par les forces de sécurité congolaises
Recommandations existantes
43. Le Gouvernement congolais devrait mettre résolument en application une politique
de tolérance zéro pour toutes les violations des droits de l’homme. Il faut à cet effet que les
autorités judiciaires mènent à bien des enquêtes approfondies et poursuivent tous les
éléments des forces de sécurité accusés d’avoir commis des violations graves des droits de
l’homme. De plus, les officiers supérieurs doivent imposer des règles de discipline sévères.
Le Gouvernement devrait aussi mettre en place un mécanisme de contrôle strict de sécurité
afin de tenir compte des antécédents des candidats à des fonctions officielles en termes de
respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et prêter
particulièrement attention aux postes clefs dans les forces armées, la police nationale et les
autres services de sécurité. De plus, pour répondre aux violations des droits de l’homme
commises par les FARDC dans le contexte d’opérations militaires dans le Nord et le Sud-
Kivu et la province orientale, il devrait prendre les mesures voulues pour révoquer les
officiers ou dissoudre les unités impliqués dans des violations graves des droits de l’homme
et les traduire en justice14. Le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires,
sommaires ou arbitraires a effectué une mission en République démocratique du Congo en
octobre 2009. Après sa visite, il a formulé six recommandations en vue de lutter contre
l’impunité dans le pays et souligné la nécessité de réformer le système pénitentiaire et de
destituer les officiers supérieurs de l’armée qui sont présumés avoir commis des crimes de
guerre, des crimes contre l’humanité ou d’autres infractions graves.
Mesures prises par le Gouvernement et situation actuelle
44. Suite à des accords politiques successifs, les forces de sécurité de l’État ont intégré
dans leurs rangs des auteurs de violations graves des droits de l’homme qui, dans un certain
nombre de cas, ont continué de s’en prendre à la population civile et de violer les droits de
l’homme. Dans les régions de l’est du pays en particulier, plusieurs bataillons des FARDC
− notamment dans le cadre des opérations Kimia II − ont perpétré des attaques et violé les
droits de l’homme, accusant des civils de collaborer avec des groupes rebelles.
45. Les pouvoirs publics ont pris quelques mesures, modestes, pour mettre en oeuvre la
politique de tolérance zéro du Gouvernement à l’égard des éléments des FARDC impliqués
dans des violations des droits de l’homme. Des soldats ont été retirés du service actif et de
simples soldats ont été reconnus coupables de violations des droits de l’homme et
condamnés, mais peu de progrès ont été faits. En juillet 2009 par exemple, la cour militaire
opérationnelle du Nord-Kivu qui siégeait à Rutshuru a connu de neuf affaires différentes.
Le 27 juillet 2009, elle a condamné par contumace le colonel Kipanga à la servitude pénale
à perpétuité et le major Lusungu à dix ans de servitude pénale principale pour crimes contre
l’humanité. Le colonel Kipanga s’est évadé de prison et, malgré sa condamnation, a rejoint
ultérieurement les FARDC. La cour a aussi condamné les deux officiers à payer in solidum
avec l’État des dommages et intérêts aux victimes de viol. Le 11 septembre 2009, le
tribunal militaire de garnison de Bunia, dans la province orientale, a condamné un soldat
des FARDC du 132e bataillon à la servitude pénale à perpétuité pour viol et meurtre. Les
FARDC l’ont aussi exclu de leurs rangs.
46. Malgré des requêtes répétées du Conseil de sécurité, le Gouvernement n’a pris
aucune mesure concrète pour lancer un processus d’assainissement qui permettrait de
passer en revue les antécédents des agents actuels et futurs des forces de sécurité au regard
de leur respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme et de les retirer
du service actif si besoin est. Au contraire, des auteurs connus de violations des droits de
l’homme, dont certains sont cités dans plusieurs rapports publics des Nations Unies, ont été
intégrés dans les FARDC, la police ou les services de renseignements.
Mesures prises par le Bureau conjoint
47. Au cours de la période considérée, le Bureau conjoint a fourni des informations au
personnel judiciaire militaire congolais, au Ministère de la défense et à la hiérarchie de la
PNC et des FARDC sur les violations des droits de l’homme perpétrées par des agents de la
PNC et des FARDC sur le territoire de la République démocratique du Congo. Il a aussi
fourni un soutien logistique et de fond pour des missions d’enquêtes conjointes à des
personnels de la justice civile et militaire congolaise. Dans le souci de multiplier les
poursuites, la MONUC a décidé de soutenir des équipes d’enquête mixtes par des projets
d’impact rapide. Le Bureau conjoint joue aussi un rôle important au sein de la cellule
d’intervention et d’alerte rapides de la MONUC qui vise à identifier les commandants
d’unités militaires qui ont systématiquement violé les droits de l’homme depuis le
lancement de l’opération Kimia II dans l’est du pays et à leur demander des comptes. De
plus, plusieurs séminaires de formation et ateliers sur les droits de l’homme ont été
organisés à l’intention des FARDC et autres forces de sécurité.
Obstacles à l’application des recommandations existantes
48. Le Gouvernement congolais fournit des ressources logistiques et financières
insuffisantes aux forces de sécurité de l’État. Les violations des droits de l’homme par les
FARDC s’expliquent par toutes sortes de causes d’ordre structurel. Les agents des forces de
sécurité ne sont pas suffisamment ni régulièrement payés et ne disposent pas de fournitures
suffisantes. Ils n’ont pas de casernes, ne suivent pas de formation et ne disposent pas
d’endroits où stocker leurs armes. Dans le Sud-Kivu, des soldats des FARDC qui
participaient à l’opération Kimia II ont organisé une série de manifestations en août 2009,
exigeant le versement de leur solde. Le 27 août 2009, à Lubarika (à 66 kilomètres au nord
d’Uvira, dans le Sud-Kivu), des soldats du 332e bataillon ont tiré en l’air pour demander
leur solde. Ils ont pillé des maisons et érigé des barrages routiers, frappant les personnes qui
refusaient de leur donner de l’argent ou qui n’en avaient pas les moyens. Il faut absolument
que le Gouvernement s’attaque aux causes profondes du problème en versant en temps
voulu la solde du personnel militaire. Il doit aussi apporter un soutien logistique pour
transporter le matériel militaire et fournir suffisamment de rations alimentaires pour que les
FARDC renoncent à leur pratique du travail forcé et cessent de piller les villages. L’armée
est très hétérogène et dans l’ensemble manque de discipline. Elle compte désormais 55
groupes rebelles et milices qui n’ont pas été contrôlés à des fins de sécurité et n’ont reçu
aucune formation. L’armée en est venue à violer les droits de l’homme parce qu’elle ne
s’est pas dotée des structures de commandement et de contrôle ni des mécanismes de
responsabilisation nécessaires pour prévenir les exactions qui pourraient être commises par
ses hommes.
III. Conclusion
49. Plusieurs obstacles à l’application des recommandations existantes ont été
repérés. Indissociables les uns des autres, ils empêchent l’amélioration de la situation
globale des droits de l’homme en République démocratique du Congo. La mauvaise
gouvernance, l’absence d’état de droit et de volonté politique expliquent un bilan
inquiétant en matière de droits de l’homme et continuent de gêner le développement
et l’élimination de la pauvreté. Les secteurs publics manquent tous de ressources et le
Gouvernement n’assure pas les droits économiques et sociaux élémentaires, tels les droits à des soins de santé et à l’éducation. Le dysfonctionnement et le manque de personnel de l’appareil judiciaire contribuent à un climat d’impunité pour les violations des droits de l’homme et portent atteinte à la sécurité des Congolais. De plus, le manque de crédits affectés à la fonction publique, à l’administration pénitentiaire et aux forces de sécurité en particulier alimente une corruption systémique et favorise la «privatisation» des fonctions de l’État. Il faudrait remédier effectivement à ces difficultés. Le Gouvernement doit arrêter tout un train de mesures cohérentes, systématiques et axées sur les droits de l’homme avec le concours de toutes
les parties prenantes locales, nationales et internationales compétentes pour donner suite aux recommandations qui ont déjà été formulées afin de protéger les droits de l’homme des citoyens.
IV. Recommandations adressées au Gouvernement de la République démocratique du Congo
50. La Haut-Commissaire prie instamment le Gouvernement de mettre pleinement
en oeuvre les recommandations que les mécanismes des droits de l’homme, dont les
sept titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, ainsi que d’autres titulaires
de mandat et organes conventionnels, lui ont d’ores et déjà adressées et dont le
présent rapport dresse le bilan.
V. Recommandations au Conseil des droits de l’homme
51. À la lumière des défis multiples qu’il appartient à la République démocratique
du Congo de relever dans le domaine des droits de l’homme et du peu de progrès
réalisés pour mettre en oeuvre les recommandations faites précédemment par
différentes composantes du système des droits de l’homme des Nations Unies, le
Conseil des droits de l’homme devrait, à sa prochaine session, fixer des objectifs
prioritaires dont la réalisation serait contrôlée à l’aune de critères mesurables établis
par rapport aux recommandations visant les sept domaines thématiques (chap. II,
sect. A à G) décrits dans le présent rapport afin d’évaluer les progrès accomplis par le
Gouvernement.
52. Le Conseil devrait rester saisi de la situation des droits de l’homme en
République démocratique du Congo et veiller à ce que la situation soit suivie
continuellement, y compris en demandant au Gouvernement d’adresser une invitation
permanente aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil et
de faciliter les missions des rapporteurs spéciaux compétents. La Haut-Commissaire
est elle aussi prête à continuer de faire rapport chaque année au Conseil sur la
situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo.
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